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Citation de Florel


Le marchandage auquel le PCC se livre avec le peuple peut se résumer ainsi : vous vous pliez à notre dictature et, en contrepartie, nous vous fournissons la bien-être, la protection et la sécurité. Tel est le contrat social non écrit de la Chine. En observant l'échec du système lors de la crise du coronavirus, un nombre non négligeable de citoyens a conclu que le Parti avait rompu le contrat. "Nous vivons dans un système qui transforme n'importe quelle catastrophe naturelle en une catastrophe encore supérieure, d'origine humaine, celle-là", a écrit le professeur de droit et essayiste Xu Zhangrun dans un essai très remarqué. "L’épidémie de coronavirus a dévoilé le cœur pourri du système chinois." C'était un spectacle remarquable, entre autres parce que la peur de la maladie et les vacances des fêtes du printemps ont retenu des centaines de millions de Chinois chez eux, où ils n'ont rien eu d’autre à faire que de suivre sur les écrans de leurs portables la pire crise sanitaire de ces dernières décennies "L'élite gouvernante de la Chine a tout à coup été jetée dans un Colisée virtuel dans lequel ses capacités politiques ont été soumises à un test impitoyable", lit-on dans un blog intitulé Chublic Opinion et tenu par un auteur de Shanghai "Et elles ont raté le test de manière spectaculaire" Non seulement on a vite compris que la ville de Wuhan et la province de Hubei avaient contribué à l'information, mais l'élite dirigeante locale s'est ridiculisée lors de plusieurs conférences de presse.
Mais c’est après la mort du docteur Li Wenliang que les citoyens ont laissé libre cours à leur colère. Cet ophtalmologue de 34 ans avait évoqué dans un groupe WeChat, en s'adressant à d'anciens condisciples, l'apparition d'une nouvelle maladie infectieuse qui rappelait le virus SRAS de 2003, et avait demandé à ses collègues de faire preuve de prudence dans leurs hôpitaux. Sur ce, la police l'avait convoqué et lui avait avait reproché de "troubler gravement l'ordre social" et de diffuser des "rumeurs" nocives : "Si vous vous obstinez, si vous ne regrettez pas vos actions illégales et si vous les prolongez, on vous demandera des comptes", a indiqué la police au jeune médecin. Jusqu'alors, Li Wenliang était un citoyen modèle du système, pas un dissident, et en réalité, même pas encore un lanceur d'alerte : il n'était pas allé voir la presse, n'avait rien posté sur u réseau public, il avait uniquement mis en garde, sur un forum semi-privé, des amis médecins contre un risque sanitaire. Même cela, dans la Chine actuelle, peut être interprété comme un acte criminel.
Sa mort a fait passer Li Wenliang du statut de héros à celui de martyr. Beaucoup d'internautes ont cité une phrase prononcée par Li dans une interview, peu avant sa mort : "Je pense qu'une société saine ne devrait pas avoir qu'une seule voix." Et aussitôt se sont propagées par millions sur les médias sociaux chinois des hashtags comme "#NousVoulonsLaLibertéd'Expression". C'était probablement la plus grande éruption de colère populaire depuis le mouvement pour la démocratie de la place Tiananmen en 1989. [...]
Pour le Parti, c'était l'horreur : la perte de contrôle l'a frappé par surprise. Mais il a vite réagi au moyen d'instrument éprouvés : censure, propagande, répression. Des videoblogueurs, comme l'avocat Chen Quishi et l'homme d'affaires Fang Bin, qui avaient fourni des images du chaos dans les hôpitaux dramatiquement surpeuplés et dépassées de Wuhan, ont disparu début février entre les mains de l'appareil de sécurité. Les discussions sur la liberté d'expression ont rapidement été bloquées et effacées. [...]
Dans le même temps, la propagande tentait de contre-attaquer. Elle lança le slogan d'une "guerre du peuple" cotre le virus, un combat pour lequel tous devaient se montrer solidaires. Elle diffusa des images des nouveaux hôpitaux sortis du sol comme des champignons, des histoires d'abnégation héroïque de la part des médecins et d'infirmières. D"une manière générale, titrait l’agence de presse Xinhua, "une attitude positive et confiante est la meilleurs immunité contre l'épidémie".

pp, 117-119.
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