Katherine Ravard

— QUOOI ?? Vous l’avez laissé filée ? Non, mais j’hallucine ou j’ai vraiment affaire à des charlots ????
— Ecoutez, chef…Je ne comprends pas ! Je pensais qu’après la soirée romantique qu’il venait de passer, il n’allait sûrement pas nous faire un coup pareil. D’ailleurs, avec le recul, je subodore que le chauffeur de taxi était son complice et qu’il avait déjà rendez-vous avec lui !
— Tu subodores, maintenant ? Mais on ne te demande pas de subodorer, Karey, mais d’exécuter les ordres, de réunir des preuves ou accessoirement de flinguer des malfrats … COMPRIS ? LITTÉRAIRE DE MES DEUX ?

« Promis, promis…c’est sûr qu’à cette heure, j’aurais promis n’importe quoi pour me faire oublier. D’ailleurs, j’adoptai l’attitude que j’avais toujours eu lorsque mes parents me faisaient une scène. En cas de pépin, je comptais jusqu’à vingt…des moutons, des chiens n’importe quoi pourvu que mes angoisses disparaissent ».

Mais Rockett semblait être au 36ème dessous car il ne se rappelait plus s’il était toujours en découvert sur la seule carte de crédit qu’il avait emportée pour ces quelques jours de mission.
— Et regarde cette cravate à rayures en pure laine, continuait G20. Non ! Je kiffe grave… C’est quoi comme marque ? Ah ! ouais, Gitman…. Tu vois Rockett, je trouve ça dingue qu’un créateur de mode n’ait pas encore lancé une ligne spéciale pour des agents secrets comme nous ! C’est vrai qu’on a des horaires de dingue mais quand même, on prend le temps de faire du shopping quand on veux ! D’ailleurs, si quelqu’un de bien intentionné leur disait qu’on est tous complètement addict, ils inonderaient sûrement nos bureaux d’échantillons publicitaires et dans les meilleurs délais !

Je l’observais maintenant à la dérobée. A qui pouvait-il bien penser, maintenant, en fermant la fenêtre devant moi ? A un type qu’il avait buté, sur un coup de tête, dans un parking souterrain ou bien à un mafieux russe échappé d’une prison américaine ? C’était impossible de le savoir, son visage était fermé comme une huître. Il me faisait un peu peur, je l’avoue, car il n’avait pas hésité à me menacer. Comment pouvait-il imaginer que j’aurais voulu lui faire du mal ? Moi qui l’adorais. C’était mon unique frère et je ne l’aurais échangé avec personne d’autre sur toute la planète !
En tout cas, le type qui rangeait ses affaires devant moi, comme si de rien n’était, semblait pouvoir changer de personnalité selon les circonstances. Il était toujours mon super brother mais peut-être aussi un dangereux killer. Le meilleur agent secret de Las Végas, toute catégorie confondue. Un nouveau James Bond capable de mettre une bastos en pleine cervelle à une taupe égarée dans la Vallée de la Mort (avant qu’elle ait pu dire ouf)…

Après deux heures de shopping (je ne vous dis pas tout ce que j’ai vu pour pas vous mettre l’eau à la bouche), j’avais changé plusieurs fois de look et opté en dernier lieu pour une nouvelle tendance sportwear plus fashion. Jean Denim, tennis Converse et sweat à capuche made in Gitman. La mallette de Paul Smith avait fini dans une poubelle. Il fallait, quand même, que je calme maintenant l’ardeur de mes achats de fringues afin d’assurer mes derniers déplacements et mes menus « BigMac Frites sauce ketchup ».

Après une dernière ballade dans un jardin public, je m’étais enfin allongé sur un banc pour réfléchir au planning de ma soirée. On m’aurait annoncé soudainement que mon oncle était arrivé en grandes pompes pour me ramener d’urgence à Las Végas que j’aurais sans doute été aspiré dans les profondeurs souterraines de la ville par des forces sataniques incontrôlables. Je songeai aux rencontres improbables que je pourrai faire à New-York et à mon futur destin qui était peut-être de devenir agent secret au S-63 !

— Qu’entendez-vous par les frais de service après-vente ? reprit Pétra.
— Disons… q.. que suite aux problèmes que nous avons connus avec le Lexinol, nous avons mis en place, dès l’année dernière, une structure efficace mais néanmoins coûteuse - composée d’experts juridiques, d’avocats fiscalistes et de politiciens achetés à notre cause - dans le but d’agir, efficacement, auprès des médias par des tentatives d’intimidation afin d’éviter tout dérapage intempestif dans l’opinion public.
— Je vois, renchérit-elle brusquement. A Kobala, notre général a mis au point un système beaucoup plus expéditif…. Il envoie les soldats du commando 512 et en général, la plainte n’a pas le temps d’arriver devant la justice puisque le déposant est mort dans des circonstances accidentelles…. Mais, reprenons, vous disiez donc ….

Le QG du S-63 était situé au 35ème étage, planqué derrière la plaque de société Assurances Mannix (père et fils). Il ne fallait surtout pas attirer l’attention des quelques touristes, parfois égarés dans la tour. Rien ne devait laisser supposer que des opérations secrètes et très spéciales étaient organisées à partir de ces bureaux

— C’est quand même bizarre, murmura Ted. On dirait qu’ils vont fêter quelque chose et ça m’étonnerait bien qu’ils préparent des plats aussi volumineux toute l’année… D’habitude, dans une dictature, on crève plutôt de faim si mes souvenirs sont bons… Va te rancarder, Martin. Avec ton badge de plongeur, tu ne crains rien !

— Tu es complètement fou, Xstar. Un peu plus et tous les G-men de New-York pouvaient t’identifier. T’as rien dans le cerveau mon pauvre, mais qu’est-ce-que je fous avec un empaffé pareil ! Tu vas faire rappliquer le FBI et tous les militaires de la ville ! T’es content de toi, pauvre idiot. Tiens, puisque tu veux jouer les stars, appelle la télé et demande des pizzas et du coca pour les otages… ils doivent avoir faim !
— Ben, justement, continuait Xstar sans se démonter, on peut tout demander en ce moment… On est en position de force. Y’a pas un truc extraordinaire qu’on pourrait demander, à part des pizzas ? Je sais pas moi…un truc du genre rencontrer Miss America ou bien le prix Nobel de la Guerre ?

Et puis, soudain l’évidence me sauta aux yeux au moment même où la femme de ménage entrait pour vider la poubelle de son bureau… Je me demandais même comment j’avais pu faire pour être aussi idiot et pendant si longtemps. Teddy, mon frère adoré, n’était pas celui que je croyais. Il était, sans aucun doute possible, un agent spécial qui travaillait pour le FBI et, accessoirement, pour l’oncle Phil. D’ailleurs, ça semblait logique si je repensais à toutes ses absences bizarres depuis un an et à ces mystérieux voyages aux objectifs inconnus. Teddy menait sûrement une double vie. Ou même une triple vie, vu son caractère suractif. Le coup de la protection de l’environnement, c’était vraiment des conneries...