Les mains de grand-mère étaient des bêtes. Elles étaient perpétuellement en mouvement. Leur agitation fébrile en faisait des souris, des souris sans poil, avec de la peau, de la peau rugueuse comme de l'asphalte craquelé. Leur forme en faisait des araignées, de petites créatures pleines de pattes au dos rond ; prisonnières de leur corne, elle cherchaient sans relâche à sortir de grand-mère, tâtonnant comme des aveugles qui viennent de perdre la vue. Elles attrapent des patates qu'elles épluchent avec avidité. Empoignent la petite cuillère à moka pour pelleter du sucre dans la tasse de café - oui, ce mouvement relève du coup de pelle. C'est un mouvement étranger à la petite cuillère, comme si grand-mère s'était directement inspirée de la récolte des patates pour pelleter des cristaux de sucre.