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Citation de Zebra


page 258 [...] Le jour des funérailles fut bien sûr, pour tous, le jour le plus triste. Sous les grands sophoras, seize gaillards, qui ne portaient pas la longue robe des bonzes, soulevèrent très lentement, très précautionneusement, sous le commandement de M. Li, le grand cercueil blanc. Il n'y avait pas de cloche funèbre; la jeune madame Qian, les cheveux sur les épaules, vêtue d'une très longue tunique de deuil en toile grossière, marchait en tête du cortège, devant le cercueil; on aurait dit un fantôme. M. Jin, triste, l'air éteint, la tenait par la main; ses larmes coulaient sur son nez rouge. Au moment où le cercueil fut soulevé de terre, il frappa le sol de ses grands pieds. Un petit groupe de musiciens se mit à jouer une musique simple à l'aide d'instruments à vent et à percussion. M. Li cria la formule d'usage pour le pourboire, mais s'interrompit en plein milieu.
Il devait être très vigilant, car il rythmait le pas des porteurs avec ses règles sonores. Cette fois-ci cependant, il n'avait pas le cœur à les frapper trop fort. Mme Qian était assise sur une charrette, attelée à une mule efflanquée, qui avançait lentement, juste derrière le cercueil. Les yeux secs de la vieille jetaient toujours la même lueur étrange et fixaient obstinément l'arrière du cercueil; sa tête remuait au rythme de la charrette.
Le vieux Qi, qui n'était pas encore rétabli et qui ne pouvait rester trop longtemps debout, suivit la scène, soutenu par Petit Shunr, depuis le seuil de sa porte. Il n'osait pas sortir. La petite Niuzi voulait elle aussi voir ce qui se passait, mais sa mère la fit rentrer à la maison. A peine venait-elle de ramener Niuzi dans la cour, qu'elle entendit sa belle-mère demander : "C'est aujourd'hui les funérailles de la famille Qian ?" Elle répondit par un simple "oui"; elle fila ensuite vers sa cuisine et se mit à couper les légumes pour le repas; à ce moment-là, elle éclata en sanglots.[...] Quand un pays a perdu son indépendance, la mort devient une compagne. Ce qui arrivait à la famille Qian était affligeant pour tout le monde et resterait à jamais inscrit dans les cœurs. Qu'il était loin le bon vieux temps où chacun vivait en paix ! [...]
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