Deux Juifs se rencontrent sur un quai de gare avec une valise à leurs pieds : "Où vas-tu? - En Amérique. - C'est loin? - Loin d'où? ". Cet humour contient sa vérité. La conscience juive traditionnelle voyait l'essentiel dans la culture et l'étude, et non dans un sol et des murs.
En allemand, chance et bonheur se disent d'un même mot, Glück. Franz commente amèrement ce qui lui semble une aberration verbale : cette chance ne fera jamais son bonheur.
Citation extraite d'une lettre de Kafka lui-même, datée du 22 Juin 1924 : "Les mots ont du goût; parler, c'est manger. Qui ne parle plus finit par mourir de faim."
Entre Franz et Louise, c'est un amour d'automne. Ces amours-là ne plantent plus, ne bâtissent plus : elles retapent, rafistolent et rabibochent avec la vie.
On appelle Histoire la partie sanglante que se jouent les êtres humains sur la planète et qui ne s'achèvera qu'à la mort du dernier.
Il y a un cercle vicieux de l'exil : on s'éloigne toujours plus du point de départ quand le point d'arrivée s'approche.
Les livres du moment se ressemblent puisqu'ils sont les reflets d'un monde commun. Bien des oeuvres sont des simples variantes d'un air du temps, des légumes de saison.
L'exil a ses paradoxes : on me fait plus français ici que si je vivais à Paris, Lyon ou Marseille. On attend de moi que je me conforme aux stéréotypes et préjugés toujours en vigueur : je devrais être jovial, aimer le vin et les femmes, soutenir l'industrie nucléaire et manger de la baguette en faisant cocorico.
La fréquentation des chefs-d'oeuvre, toxiques ou toniques, procure un aplomb facile. Lire, c'est s'installer dans la langue et participer de son autorité. Jouissant du privilège de la francité, j'ai acquis les certitudes du bon usage et je prenais l'art de dire pour un art de vivre.
LE SUICIDE EST UN ACTE :on rend la vie on prend la mort. Se suicider est pronominal, c'est à dire réflexif et réfléchi. C'est un des moments les plus personnels et les plus égoïstes qui soient.