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Citation de Aquilon62


Voici Hélendrude.

On peut préférer l’appeler Elyndruda, ce qui sonne mieux, peut-être, à nos oreilles, et choisir en toute impunité de maquiller ses traits, de la décrire comme ceci ou comme cela, et reconstituer autour d’elle un monde bâti de matériaux imaginaires, ombres de pierres, ombres d’eaux et de carpes énormes, ombre de l’ombre des arbres centenaires. Hélendrude est une moniale. Elle vit en dehors du siècle, dans un temps cyclique rythmé par les cent cinquante psaumes de l’Ancien Testament et le passage des astres. Comme son monde de reflets, elle avance en cercles de plus en plus larges, tendant aux rivages ternes de la fin des temps, cette grève où, tous, nous patientons en stase, dans l’attente d’un verdict à nul autre pareil.

Hélendrude aime les chiens, les lévriers gris du couvent de planches claires, et la terre nue sous ses pieds nus. Au printemps, vêtues de blanc, elle et ses sœurs avancent vers les bois hirsutes poussés des marécages, et y coupent, du jour à la nuit, les brassées de joncs à épandre sur les pierres. Elle n’est pas très habile de ses mains, ni très pieuse, et son latin achoppe aux termes les plus communs. Ses vertus sont surtout des manquements : elle est discrète parce que peu vive, elle est obéissante et simple. Elle vit dans un monde clos, gros comme un poing fermé, sans vraie curiosité pour là d’où viennent les oiseaux du ciel, où file le cours du fleuve, et ce qui pousse sur l’autre rive. Hélendrude se nourrit de l’affection de ses sœurs et vieillit doucement. On peine à lui distinguer des ascendants. On la dépeint seule, au milieu du tableau, agenouillée au sol, paupières et lèvres closes, front bas, humilité.

(INCIPIT)
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