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Citation de PatriceG


Léon Tolstoï vu par son fils le comte Léon Tolstoï fils, deuxième livre écrit sur son père, à une dizaine d'années d'intervalle. Ce livre s'attache plus aux idées de son père, des chapitres inédits y ont été ajoutés pêle-mêle;

Thomas Masaryk chez Léon Tolstoï


Thomas Masaryk né en 1850 en Moravie est un tchèque qui va militer pour l'indépendance de son pays : il en sera le grand artisan et sera le premier Président de la République tchèque jusqu'en 1933.

il me semble en avoir parlé quand j'ai écrit sur le peintre Micha

Quand il rencontre Tolstoï dans ses terres, il est alors un grand professeur-philosophe. C'est un homme qui a d'énormes qualités humaines, elles inspirent le respect : un grand homme. C'est lui qui va sauver la tête du juif Hilsner accusé de meurtre rituel en Bohème ..

"Le Professeur Thomas Masaryk, comme coeur et esprit, ouvert à toutes les belles et grandes pensées de son temps ne pouvait pas, sans doute, passer à côté de Tolstoï sans s'arrêter et sans vouloir voir et connaître de près l'écrivain et le moraliste russe.

Peut-être et même sûrement, mon père aux yeux de Masaryk était-il aussi un des plus puissants révolutionnaires de son temps -quoique lui-même, il ne voulait ni l'admettre , ni l'être - et c'était une raison pour le Président actuel de la nouvelle République slave de s'intéresser aux idées de Tolstoï.

Je me souviens de sa visite à Iasnaïa Poliana et je vais en noter un épisode qui resta profondément gravé dans ma mémoire.

Comme le professeur s'intéressait beaucoup à la vie du peuple russe, mon père l'invita à la vie du peuple russe, mon père l'invita à une promenade au village. Ils longèrent la rangée des isbas et entrèrent dans une maisonnette appartenant à un des plus pauvres paysans.

Comme d'ordinaire dans cette demeure étroite et primitive, construite en bois avec une cheminée au milieu, il y avait à peine place pour trois hommes debout et il fallait baisser la tête pour entrer. L'air était lourd, pleins d'odeurs différentes, surtout à cause du bétail qui était entassé dans l'isba par suite du froid intense du dehors. En hiver, les paysans font rentrer au chaud les veaux, les poules, et les brebis.

Une saleté naturelle régnait dans l'isba qui n'était pas visible à ceux qui l'habitaient, mais qui était frappante pour un oeil civilisé.

Masaryk et Tolstoï entrèrent et regardèrent ce logis. Mon père échangea quelques paroles avec le moujik maître de la maison et vite, ils sortirent dans la rue pour respirer l'air pur du dehors. Tout d'un coup Tolstoï remarqua que les yeux de son hôte étaient pleins de larmes. Il pleurait ..
- De quoi ? Qu'arrivait-il ?
Il pleurait de la misère effroyable de ce grand peuple-frère. Il comprit peut-être jusqu'au fond l'origine de la doctrine tolstoïenne. Mais, pensa-t-il probablement, cela n'est pas par cette doctrine que je pourrais aider mon peuple et les pauvres russes ; il y a d'autres moyens plus sûrs et plus vrais.

Le destin a voulu que, plus tard, Masaryk ait non seulement trouvé ces moyens pour son peuple, mais les lui ait donnés.

Hélas, il n'a pas pu le faire pour la Russie. Mais son oeuvre immortelle restera un exemple à suivre pour les générations à suivre et d'autres la prolongeront. On devra appliquer un jour, les mêmes principes d'état à la plus grande des nations slaves qui, à présent, traverse une des plus horribles crises de son histoire.

Quand Masaryk quitta Iasnaïa, nous parlâmes de cet homme remarquable à mon père.
Il me dit sur un ton attendri, bas et étonné :
- Quand il sortit d'une isba, il se mit à pleurer.
- Simplement, parce qu'il avait vu la misère de nos paysans. Il était frappé de voir les hommes vivre ensemble avec les animaux."
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