Le pacifisme de la majorité des syndicalistes enseignants
repose sur un certain nombre de convictions qu’ils
se sont forgées dès le début du conflit. Parmi elles, la
certitude que l’Allemagne, contrairement à ce qu’on ne cesse
de proclamer, n’est pas l’unique responsable de la guerre et
que le peuple allemand ne peut et ne doit pas être assimilé à
« Guillaume » et à ses complices. Pour ces militants qui ne
veulent pas, malgré les circonstances, désespérer de
l’internationalisme ouvrier, il faut d’abord dénoncer cette
germanophobie qui se déchaîne depuis la déclaration de guerre
et qui s’exprime même dans L’École émancipée.
Puisse la lecture de ce livre convaincre ceux qui, luttant pour un monde meilleur, sont parfois gagnés par le doute et le découragement, qu’à l’image de ces instituteurs et institutrices, aussi courageux et déterminés que modestes, engagés dans une lutte à l’issue pour le moins incertaine, ils ne doivent jamais baisser les bras et abandonner le combat.
Mais ce que nous n’avons jamais accepté, ce que nous n’accepterons jamais, ce que nous repoussons du pied avec répugnance méprisante, c’est cette prétention du gouvernement de la République à nous transformer en agents politiques de la plus basse espèce, en propagandistes « anti-boches », en missionnaires de la haine la plus aveugle, enfin – honte et infamie – en bourreurs de crânes à l’usage de nos propres élèves… Nous devons refuser toute propagande en faveur de la guerre
En dénonçant l’« Union sacrée », en restant fermement attachés à la lutte de classe, qui servit de base à la constitution de l’Internationale socialiste, nous, socialistes et syndicalistes allemands et français, puiserons la fermeté de lutter parmi nos nationaux contre cette affreuse calamité et pour la fin des hostilités qui ont déshonoré l’humanité
Ces « modestes » enseignants ont su raison garder et ne se sont pas laissé submerger par la vague nationaliste et xénophobe qui a incité tant de beaux esprits, d’écrivains à la mode ou d’éminents universitaires à proférer des insanités dont la stupidité, cent ans après, ne cesse de nous stupéfier