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Critiques de Louis Fontaine (1)
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Un enfant dans la guerre

Il est intéressant de voir la guerre à travers les yeux de ceux qui n’ont rien fait que de la subir en essayant de vivre plus ou moins normalement. De se laisser porter par ce récit qu’un grand-père destine à sa descendance sur ce que fut la vie entre Paris et la banlieue pour ceux qui, comme notre protagonistes, n’ont été ni héros ni bourreaux lors de cette seconde guerre mondiale et plus précisément dans la période de l’occupation Allemande de 1940 à 1944.

Le regard du gamin, sa naïveté du moment nous donne un récit frais et assez universel pour ceux qui ont vécu, à un moment ou un autre de leur vie, dans une ville assiégée, dans une ville en guerre.



« En rentrant à la maison avec mon précieux lait, je vis défiler pour la première fois dans l’avenue principale de notre ville plusieurs compagnies de la Wehrmacht. Ils avaient une allure martiale qui nous serrait le cœur, mais à laquelle nous n’étions plus guère habitués avec les régiments français. Les huit mois de « drôle de guerre » à Villeneuve, et le fameux Veme avaient fait mon édification. J’avais pu constater combien le relâchement sévissait chez nous. Ce qui frappait surtout chez ces Allemands, c’était leur discipline ainsi que leur aptitude au chant. Chaque détachement avait son couplet. Le refrain, repris en chœur par des voix mâles à plusieurs tons, faisait un effet impressionnant. »





Il est également intéressant de lire les sentiments du jeune qui, semble n’avoir aucun penchant politique réel. Il est entouré d’une mère qui a des sympathies pour l’occupant Allemand et dédaigne "l’imposteur" De Gaule qui harangue depuis Londres. Un père ancien combattant qui ne peut digérer la défaite du pays et une multitude de cousins, cousines, tantes avec lesquels il traverse des moments plus ou moins dures de cette guerre 39-40.



Il est intéressant de lire, suintant du texte, les penchants du narrateur adulte qui de temps à autre prend la place du gamin et nous montre son certain sentiment de révolte quant au sort réservé au Général de Pétain. Il souligne plusieurs fois le combat de celui-ci pour que les prisonniers soient bien traités par les Allemands et ramenés en France, mettant un peu en sourdine ses responsabilités.

Les résistants sont à peine évoqués (sauf évidemment le bon pasteur courageux) sur la fin du livre et surtout pour souligner les exactions des FFI (Forces françaises de l’intérieur) d’après la guerre (notamment les femmes tondues et les procès expéditifs).

La colère de l’auteur, grand-père, est évidente contre les sorts des Robert Brasilach, Paul Chack et autre Président Laval exécuté pour collaboration avec l’ennemi, alors que les mots de l’enfant, plongé dans ces temps d’occupation, soulignent son mépris du régime de Vichy et sa déception quand Laval échappe à sa tentative d’assassinat. L’aversion certaine de l’auteur pour les communistes auxquels il refuse le moindre mérite, si ce n’est du bout des lèvres, et souligne même qu’ils ne sont pas entrés en résistance par patriotisme mais uniquement parce que Hitler s’était attaqué à la Russie.



« Quelques jours plus tard, alors que le pays était déjà libéré, une foule de villageois en colère mené par des FFI, après avoir procédé à plusieurs arrestations de prétendus suspects de Collaboration, montèrent dans les hameaux pour pendre, disaient-ils, des fermiers qui, d’après eux, avaient toujours souscrits sans barguigner aux réquisitions des Allemands. Là encore, le brave abbé Thibeau s’interposa entre la foule et les agriculteurs apeurés, pour éviter à ceux-ci un lynchage, ce que son autorité finit heureusement par obtenir. »





Et surtout, sur plusieurs pages, l’auteur fait une vraie ode au scoutisme. On a presque l’impression que les scouts, interdit par les Allemands durant l’occupation, du seul fait qu’ils ont continué leurs activités en clandestins, sont les seuls français à avoir servi le peuple pendant l’occupation.



Sinon, cette autobiographie, « Un enfant dans la guerre », est un très intéressant voyage dans le quotidien sans héroïsme d’une famille francilienne. C’est assez particulier de lire les moments de bombardement des villes que l’on connaît (Meulan, Pontoise...), de visualiser les embuscades, les positions des blindés dans une forêt.

De réaliser la honte qui a tenaillé certains français face à la déculottée allemande et donc, quelque part, les scories qui subsistent dans les relations franco-allemandes. La naïveté et l’ignorance face au sort des juifs qui partaient pour « des camps de travail ». La sympathie de beaucoup pour les Allemands. La colère contre troupes Alliés (ben oui, ils ont sacrément bombardés la France et donc causé beaucoup de dégâts).



« A partir de 1941, le gouvernement de Vichy et les Allemands proposèrent la "relève" des prisonniers. Pour assurer le retour de certaines catégories, on devait faire partir deux ou trois fois plus de travailleurs volontaires en Allemagne. Ceux-ci étaient envoyés dans des usines et touchaient un salaire assez intéressant. Le peu d’enthousiasme suscité par cette mesure décida les Allemands à créer le STO, Service du Travail Obligatoire. »





On se prend à penser qu’il est dommage que dans les représentations historiques officielles de cette fin de guerre, la France ait quasiment gommé ces Noirs qui sont venu libérer Paris alors même que le gamin Parisiens de bonne famille, que l’on ne peut pas accuser de sympathie avec la cause noire (!), souligne la présence des afro-américains dans la ville de Versailles, aux portes de Paris.



« En effet, dans les petits hôtels qui bordaient la place d’Armes, des filles généreuses (probablement les mêmes que celles qui avaient fraternisé avec les Allemands) faisaient passer d’agréables moments à ces soldats, parmi lesquels on remarquait beaucoup de grands Noirs. »





Ce livre constitue une très intéressante lecture. Écrit de façon fluide, très académique mais d’une écriture dynamique et sans fioriture. Très bon témoignage, à lire avec un regard critique mais l’esprit ouvert pour avoir une autre vision de cette guerre. Moins héroïque, plus pragmatique, peut-être plus pleutre mais en tout cas très humaine.



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