Louis Kervran

L'Amérique était connue des Celtes, des Nordiques, des Basques et de leurs voisins du nord-ouest de la péninsule ibérique, Espagnols et Portugais, bien des siècles avant Christophe Colomb. Ceci n'est plus à démontrer. Basques et Portugais y allaient à la pêche à la morue et à la baleine, au moins, semble-t-il, depuis le XIIe siècle.
Quant aux Vikings, on sait qu'ils s'installèrent au Groenland à la fin du Xe siècle. Leurs sagas sont précieuses pour la datation des faits. Elles nous montrent que c'est à l'aube du XIe siècle qu'ils tentèrent de s'installer sur le continent américain, en partant de leurs bases du Groenland ; ils avaient aperçu ce continent dans leurs voyages d'Islande au Groenland, déportés par les tempêtes, et l'un d'eux, plus malchanceux, avait été jeté à la côte en 983.
Capturé par les Celtes, il fut baptisé et relâché trois ans plus tard. Ainsi les sagas elles-mêmes reconnaissent que les Celtes se trouvaient sur le continent américain avant que les Vikings ne s'installent même au Groenland, car ce navire jeté à la côte en 983 allait d'Irlande (alors aux mains des Vikings) en Islande, également occupée par eux à l'époque.

Mais, jusqu'au début du IXe siècle, les monastères irlandais, et jusqu'au début du Xe (918 à 920) les monastères bretons, ont été les détenteurs des savoirs de l'Antiquité, alors que partout ailleurs régnait l'obscurantisme barbare, dont le fond fut atteint en Gaule avec la fin des Mérovingiens, sauf en ce qui concerne la technologie qui resta de grande valeur.
On sait d'ailleurs que Charlemagne, à la fin du VIIIe siècle, frappé par la succession de deux éclipses, voulut savoir ce que ceci signifiait et qu'il fit venir d'Irlande des moines qui lui expliquèrent comment ce phénomène naturel pouvait se calculer, se prédire.
Les Celtes du nord-ouest, héritiers spirituels des civilisations de l'est méditerranéen, étaient plus avertis que les Romains en matière de géographie, d'astronomie et de navigation ; les Romains n'ont pas été de grands marins, ni de grands géographes, ni de grands mathématiciens ou scientifiques.
Un exposé, même très résumé, de toutes les connaissances des Celtes à la fin du Ve siècle et au début du VIe serait fastidieux et trop long. Nous nous bornerons donc à énumérer celles qui montrent pourquoi les navigations vers l'Amérique ne sont nullement surprenantes.

L'Irlande restera même complètement en dehors de la romanisation et des Barbares. Ce qui explique que, tout en ayant sombré avec la chute de Rome, c'est dans les pays Celtes que Charlemagne ira chercher des astronomes à la fin du VIIIe siècle. Au Ve siècle, la culture grecque passa des druides aux grands évangélisateurs celtes, qui furent souvent des druides convertis. Ce savoir entrera dès lors dans les monastères, et s'y conservera jusqu'à leur destruction par les Normands au IXe siècle en Irlande, au Xe en Bretagne.

Venues des Phéniciens et des Grecs, transmises par les Druides, toutes les connaissances de l'Antiquité méditerranéenne étaient assimilées par les Celtes ; pour les druides, "les études scientifiques et littéraires duraient douze ans" (Françoise Le Roux - Ogam - XII - 6).
Quand le pouvoir de Rome s'effondra, ce furent les druides qui continuèrent à utiliser le savoir des civilisations de la Méditerranée orientale, de Byzance, de Palestine.