L'herbe cueillie à la montagne,
Près de la violette en fleur,
Nous rappelle de sa compagne
Et le parfum et la couleur ;
Elle ramène à notre oreille
Les bruits errants sous les grands pins,
Et du troupeau qui se réveille
La clochette aux sons argentins.
Ainsi, toi que chacun admire,
O chère enfant ! dans ton œil bleu
Je retrouve encor le sourire
Qui répond au regard de Dieu !
Des lueurs d'or, ô mon idole !
Eclairent tes cheveux châtains,
Dernier reflet de l'auréole
Qui brille à la tête des saints !
A voir ton petit pied si frêle,
On sent que, lorsqu'il était las,
Là haut tu déployais une aile
Pour soutenir son faible pas ;
Qu'ignorant la ronce et la pierre,
Tes petits talons frais et doux
N'ont jamais heurté sur la terre
Les angles aigus des cailloux !
Mais, hélas ! ici tout s'efface !
Couché dans l'herbe, le lac pur
Garde d'abord à sa surface
Les vives couleurs de l'azur ;
Et dans le flot clair qui l'arrose,
Timide, l'églantier fleuri
Ose à peine mirer sa rose
Ou baigner un rameau flétri.
La mer dormait immobile et muette :
Le goëlan et la blanche mouette
Dormaient aussi sur son sein affaissé,
Et chaque flot, par le calme effacé,
Nonchalamment laissait tomber la rose
Que pour adieu le soleil y dépose !
Ah ! malgré moi, pourtant mon âme voyageuse
Au loin a déployé son aile aventureuse,
Et, prenant son essor vers de lointains séjours,
Va chercher un repos qui la fuira toujours.