Louise Georges Renard

-Où vas-tu ?
-Et vous ?
-A Timbo, porter de l’ivoire
-Moi aussi, à Timbo, cherchez un, trésor…
A ce mot magique, les yeux s’illuminèrent :
-Quel trésor ?
-Une brebis blanche que le maître veut avoir parce qu’elle est fétiches !...
-Que me contes tu là ? Jamais nous n’en avons entendu parler!
-Cela est pourtant. Vous verrez bien, si je vais avec vous !
On se concerta longuement, ce qui donna lieu à une halte au milieu du chemin. Pendant ce temps, Mounza, assis et comme absolument détaché du sort de sa demande, fumait sa pipe avec une belle indifférence. Enfin, un des porteurs quitta le concile :
-C’est dit frère, tu peux venir avec nous !
Mounza se mis debout sans hâte :
-Bien frère. Je suis prêt.
Il évita de regarder Anne-Marie, qu’il avait paru contempler avec dédain lors de sa rencontre. Même à ce moment, il avait murmuré entre haut et bas :
-Qu’est ce que cela ?
Et on lui avait répondu :
-Une enfant que nous avons trouvé. Une fille à peau pale… Nous allons la soigner, l'engraisser, il parait que c’est bon à manger !
Mounza fit :
-Peuh !... Pas tant que ça ! Ça sent mauvais, ces peaux pales, ça donne mal au cœur !
Assertion qui n’avait été combattue par personne ; on sait que le blanc donne au « nègre » une fâcheuse impression de cadavre