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Citation de Didou40


"Qu’est-ce que le moi ?"
Un homme qui se met à la fenêtre pour voir les passants ; si je passe par là, puis-je dire qu’il s’est mis là pour me voir ? Non ; car il ne pense pas à moi en particulier ; mais celui qui aime quelqu’un à cause de sa beauté, l’aime -t-il ? Non : car la petite vérole, qui tuera la beauté sans tuer la personne, fera qu’il ne l’aimera plus.
Et si on m’aime pour mon jugement, pour ma mémoire, m’aime-t-on, moi ? Non, car je puis perdre ces qualités sans me perdre moi-même. Où est donc ce moi, s’il n’est ni dans le corps, ni dans l’âme ? et comment aimer le corps ou l’âme, sinon pour ces qualités, qui ne sont point ce qui fait le moi, puisqu’elles sont périssables ? Car aimerait -on la substance de l’âme d’une personne, abstraitement, et quelques qualités qui y fussent ? Cela ne se peut, et serait injuste.
On n’aime donc jamais personne, mais seulement des qualités.
Qu’on ne se moque donc plus de ceux qui se font honorer pour des charges et des offices, car on n’aime personne que pour des qualités empruntées.

(Pascal, Pensées, "Qu’est-ce que le moi ?" Laf. 688, Sel. 567.)
(…)

Si l’on s’en tient aux seules qualités particulières / générales, on n’aime jamais vraiment personne et, dans cette optique, Pascal a raison, il faut cesser de moquer les vaniteux qui prisent les honneurs. Après tout, que l’on mette en avant sa beauté ou ses médailles revient à peu prés au même : la première est (presque) aussi extérieure à la personne que les secondes. Ce qui fait qu’un être est aimable, ce qui donne le sentiment qu’on pourrait continuer à l’aimer quand bien même la maladie l’aurait défiguré, n’est pas réductible à une qualité, si importante soit-elle. Ce que l’on aime en lui (et qu’il aime en nous, le cas échéant) et que par conséquent nous devons développer pour autrui comme en soi, ce n’est pas la particularité pure, ni les qualités abstraites (l’universel), mais la singularité qui le distingue et le rend à nul autre pareil. A celui ou celle qu’on aime, on peut dire affectueusement, comme Montaigne, « parce que c’était lui, parce que c’était moi », mais pas : « parce qu’il était beau, fort, intelligent »…
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