Manuel Alvarez

Ce n’est pas moi qui écris ces lignes.

Ou, plus exactement, la main qui, en ce moment même, trace les lettres et les ajuste pour vous permette de lire ce que j’écris. Cette main, ensemble complexe d’os, de muscles, de nerfs, de cartilages et autres éléments vitaux ; cette main n’est pas la mienne.

Cette main dont les doigts portent un stylo et glissent sur le papier, cette excroissance tactile ne m’appartient pas.

Je devine ce que vous pensez... De deux choses, l’une : soit ce type est fou et son récit n’a aucun intérêt, soit les progrès miraculeux de la médecine ont permis de lui greffer un organe qui n’est pas le sien. La chose est, certes, aujourd’hui peu courant, mais elle tend à se répandre et il n’y a pas lieu d’en faire un fromage, ni même un roman.

Vous vous égarez.

La réalité est bien plus incroyable encore... Incroyable ! Et le mot n’est pas excessif car, même au bout de mon récit, je sais que vous ne me croirez pas.

11 étages, 240 marches, 12 paliers. À 82 ans, il est des chiffres qui vous donnent le vertige, surtout lorsque la mort rôde et s’insinue entre les rides.