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Citation de JLB21


Le dernier dîner sur le Queen Guillermine, alors qu’ils venaient d’arriver à Djakarta, avait un thème à la fois provocateur et menaçant : « Rijstaffel méditerranéen. »

La « table de riz » version biscutérienne se composait de riz tel que le concevaient les Indonésiens ou les Chinois : paysage de fond et texture atomique de saveurs complémentaires. Si, habituellement, un rijstaffel exhibitionniste dépassait la vingtaine de petites assiettes complémentaires du riz, Biscuter était arrivé à vingt-cinq avec des adaptations de tapas, pas seulement ampurdanaises : poulet aux crevettes, calamars dans leur encre, minuscules calamars farcis, aumônières de chou, escalibada de légumes grillés au four, champignons et rondelles de saucisse, poisson à la marinière, soupe de poisson aromatisée au fenouil, veau rôti, poulet à l’ail, poulet sauté à la tomate, tripes aux pois chiches, salades et leur sauce romesco aux amandes, morue grillée à la plaque, morue à la basquaise, boulettes de sépions, épinards aux pignons et aux lardons, cubes de fromage sautés à l’ail et aux poivrons rouges, salade composée de betterave, cornichons, câpres, olives farcies, champignons et lamelles d’agneau en sauce aigre-douce, filet mignon à l’aigre-doux, huîtres fumées au champagne, espardenyes pour les Catalans, holothuries pour les autres, à l’ail et à la coriandre, fonds d’artichauts farcis d’œufs de caille et d’une petite cuillerée de caviar, cubes de thon cru macérés dans un mélange de gingembre, vinaigre balsamique, sauce de soja et petits oignons marinés à la sauge. Si la purée de cacahuète dominait et différenciait les goûts dans la préparation indonésienne, Biscuter l’avait méditerranisée en substituant à la graine unique un hachis de pignons, d’amandes, de noisettes, d’ail, de persil, parfois de piments doux secs, jouant sur une variation d’herbes aromatiques conventionnellement méditerranéennes et de vins et eaux-de-vie locaux, vins rouges et blancs, rancios, mousseux, cognac, ouzo, huiles italiennes, vinaigres de xérès et balsamique. La table de riz était si originale qu’elle avait été rebaptisée « rijstaffel Biscuter », et très clairement la main de Biscuter avait barré son nom et écrit à la place : « Millénaire ». Table de riz servie avec des vins blancs néo-zélandais, des vins rouges de Loire légers et les inévitables mousseux franco-allemands hégémoniques, en tout cas à bord. Le dîner s’ouvrit sur un fleuve de genièvre et de bières hollandaises glacés et, sur la grande cocotte-minute de la croisière, fut reposé le couvercle sous lequel ne cuisaient que des pensées agréables, car Biscuter avait réussi le dîner de sa vie et de son histoire.
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