Londres se conforme ainsi à la formule consacrée qui veut que le possesseur de la mer tienne, par extension, le monde.
Toutes ces spéculations sur l'avenir du Croissant fertile n'augurent rien d'encourageant. Et c'est bien dommage : l'unification utopique de ce territoire-charnière créerait le seul État avec un triple débouché maritime sur la Méditerranée, la Mer rouge et le Golfe. Celui-ci aurait de puissants atouts à faire valoir. Malheureusement, le souvenir de l'époque mythique des empires mésopotamiens a été systématiquement effacé des mémoires, en plus de l'être désormais du paysage à cause de la barbarie de Daech. L’ensemble de la région menace de devenir une zone grise, ou plutôt un trou noir attirant dans son tourbillon les États et empires voisins qui tentent, à leur façon et selon leurs intérêts, de s'en prémunir ou d'en tirer profit.
Là où l'empire reconnaissait la pluralité des populations sous son autorité, voire en tirait profit pour asseoir son pouvoir, l’État central, aux mains d'un clan issu d'une communauté spécifique, s'est mis à nier toute altérité à son propre modèle.
Une dernière ironie de l'histoire est que de nombreux anciens baasistes irakiens comptent maintenant parmi les rangs djihadistes, y compris, voire surtout, en position dirigeante. Brutalement écartés par les Américains après le renversement de Saddam en 2003, puis maintenus en marge par un pouvoir chiite de plus en plus inféodé à l'Iran, ils ont rallié le camp de leurs anciens ennemis. Nationalistes autoritaires et fanatiques islamistes enfin réunis pour le même combat d'abolition des frontières !
Al-Andalus n'est plus, mais Constantinople non plus. L'épopée des croisades qui visait les musulmans, a en réalité porté un coup presque fatal aux Byzantins. Ces derniers ont vu leur capitale saccagée et occupée par les chevaliers latins après la quatrième croisade, au XIIIe siècle.