« Gabrielle rêve d’un prince charmant qui l’enlèvera à cet ennui qui lui colle à la peau. » (p. 49)
En 1893 Gabrielle Colette a 20 ans. De cette
époque reste une série de photos d’elle dans
une robe claire bordée de plusieurs rangs de
ganse en velours noir. Une, particulièrement,
restitue ses derniers moments de jeune fille :
une photo de famille prise au printemps,
quelques semaines avant son mariage. Elle y
pose, assise sur les marches du perron de leur
maison de Châtillon-Coligny, entourée de ses
parents, Jules et Sidonie, et de ses deux frères
Léo et Achille.
Elle a le physique des jeunes filles de son
époque : un corps robuste et plein, des tresses
relevées en chignon et attachées avec un noeud
de velours, un visage pointu encore enfantin
avec des yeux de chat. Pourtant si l’on regarde
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plus attentivement, ses rondeurs d’adolescente
contrastent avec la maturité de son regard,
mystérieux et attirant, qui toise l’objectif. Dans
ce regard, elle est déjà là tout entière, notre
Colette nationale, la femme aux mille facettes
qui a surpris son époque et osé au-delà du
possible.
« La contradiction de Colette est que, d’un côté elle se battra bec et ongles pour être reconnue en tant qu’auteur des livres écrits du temps de Willy, et de l’autre, elle les dénigrera. En même temps, elle jouera Claudine au théâtre. » (p. 124)
Dans ce regard, elle est déjà là tout entière, notre Colette nationale, la femme aux milles facettes qui a surpris son époque et osé au delà du possible .
Et si à 20 ans Gabrielle Colette porte sur le monde qui l’entoure un regard empreint d’une distance subtile, c’est qu’elle a ses raisons .
Elle viens de traverser une épreuve déchirante qui la laisse nostalgique à jamais , elle a perdu le paradis de son enfancr.
Un an plus tôt elle a dû, avec sa famille, quitter la maison où elle était née et où elle avait grandi .
…Jules est le maître chanteur de la maisonnée, ainsi ke surnomme Sido en plaisantant avec sa voix veloutée de baryton qui résonne jusque dans la rue de l’Hospice . Il célèbre son amour pour sa Sido chaque jour en chantant
Je pense à toi , je te vois , je t’adore
À tout instant, à toute heure en tout lieu,
Je pense à toi quand je revois l’aurore,
Je pense à toi quand je ferme les yeux .
Et elle avance avec, tapie en son for intérieur, la douleur sourde d’apprendre à se soumettre à celui qui vous fait souffrir .
« Claudine est effrontée, cruelle et assume sa méchanceté avec jubilation. En un mot, elle est amorale. » (p. 101)
« Ainsi c’est ça la vie de femme, le plaisir charnel attaché à l’humiliation du mâle tout puissant. » (p. 74)