Deux heures à tuer... une éternité pour qui vient de passer sept ans au cachot.
L'absence est un poison et je suis en train de mourir.
Les rois de la rue
À quoi tient la légende qui entoure les apaches et distille la peur dans les rues de Paris? A leur allure si particulière, d'abord: tatouages, cheveux gominés, casquette, chemise fripée, chaussures lustrées... A leur violence, ensuite: capables de tous les mauvais coups, ils feraient grand usage de leur couteau à cran d'arrêt, aussi dit surin ou eustache. À leur morgue, enfin: même s'ils viennent des hauteurs de Belleville, de Ménilmuche ou de la Butte, Paris est leur royaume. Alors ils descendent en bandes à Montparno, la Mouffe, au «Quartier» (latin), aux Halles ou à Sébasto, pour y rôder, chaparder, taquiner le bourgeois, et rêver... Pourquoi travailler, si on peut traîner dans les rues et vivre d'expédients? Quant aux représentants de l'ordre, sans peur de les affronter, ils ne perdent pas une occasion de les ridiculiser, en dérobant sabres et baïonnettes des gardiens de la paix, par jeu. Et pourtant la légende voudrait que ces délinquants soient aussi des bandits au grand cœur...
Il vit la prison comme certains l'hôpital, soucieux de fuir les plus malades, les trop contagieux qui risquent de le contaminer.
Les jours succèdent aux jours, la barrière grince incessamment, des visiteurs entrent, d'autres sortent, la maison déborde de figurants. Et sue le vide.
Il n'y a pas de ville au monde où les sensations de plaisir soient plus nombreuses et plus variées qu'à Paris. Tout distrait, tout amuse, tout enchante, tout instruit. En flânant dans les rues, sur les boulevards, dans les promenades publiques, le long des quais de la Seine, que de scènes jolies et pittoresques...
"Les plaisirs parisiens : guide des plaisirs destinés aux étrangers", 1908