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Critiques de Marie-Joseph Stève (6)
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Il était une fois la Mésopotamie

Cet opus de la collection « Découvertes Gallimard » relève de la thématique « Archéologie » ; autrement dit, on s'intéresse ici à l'étude des sites, objets et documents découverts en Mésopotamie à partir de la fin du XVIIIème siècle, et non à l'histoire de cette région. Et c'est – à mon sens – encore plus passionnant !



En effet, c'est presque un roman à suspens qu'on nous donne à suivre. Tout commence donc avec la découverte d'un corpus d'inscriptions gravées dans la pierre, qu'on nommera par la suite les « écritures persépolitaines », et qu'on trouvait régulièrement disposées en trois colonnes, sous la forme de trois écritures cunéiformes présentant des ressemblance mais qui, manifestement, n'en étaient pas moins distinctes. On supposa – à raison – qu'il s'agissait là des mêmes textes écrits en trois langues. Cependant, contrairement à Champollion avec la pierre de Rosette, les chercheurs n’étaient capables de lire aucune des trois versions. S'engagea alors un véritable combat pour le déchiffrement de ces trois écritures... Ce lent et difficile travail est donc relaté dans les deux premiers chapitres du livre.



Je ne vous cacherai pas que les nombreuses explications sur le fonctionnement de ces trois langues, et plus spécifiquement sur celui de la troisième, la plus complexe, ont réclamé toute ma concentration de novice. Certains courts passages m'ont parfois même légèrement échappé. J'ajouterai que posséder quelques notions, même très vagues, concernant les langues sémitiques, les hiéroglyphes de l’Égypte antique, ou d'autres langues idéographiques comme le mandarin ou le japonais, peuvent s'avérer utiles pour suivre le cheminement des chercheurs qui se sont consacrés à l'étude du vieux-perse, de l'élamite, de l'akkadien, de l'assyrien et du sumérien. Oui, parce que finalement, on a découvert et étudié de plus en plus de documents et de plus en plus de langues... Bref, c'est avec un soulagement et une joie intense que nous parvenons enfin au terme des travaux de déchiffrement des écritures persépolitaines. Alors, nous pouvons passer aux fouilles archéologiques proprement dites.



Les trois chapitres suivants sont donc consacrés à l'organisation des travaux de terrain, des débuts initiés par les Français, par les Anglais, puis par les Allemands (ce qui explique les trésors que recèlent les salles du Louvre, du British Museum et du Pergamonmuseum) aux fouilles plus récentes organisées par les équipes irakiennes, souvent dans le cadre d'une collaboration internationale. On y suit la découverte des fameux taureaux ailés du village de Khorsabad, bien connus des visiteurs du Louvre, des sites de Ninive ou d'Ur, pour ne citer que les plus fameux, et, bien entendu, de la porte d'Ishtar et de toute la ville de Babylone. Des recherches d’autant plus impressionnantes lorsque l'on sait que tout cela était enfoui plus ou moins profondément sous la terre et ne se présentait en général que sous la forme de simples tells.



Un bémol, cependant. Pour moi qui n'avait qu'une vague idée de ce qu'étaient la Mésopotamie, l'Assyrie, Akkad, la Babylonie, Sumer, une chronologie sommaire ainsi qu'une carte géographique en début d'ouvrage m'aurait sérieusement aidée dans ma lecture. Certes, une carte des plus grands sites archéologiques de Mésopotamie a été intégrée : mais elle n’apparaît qu'en page 107 ; si cela s'explique par l'articulation du livre, ça ne s'en trouve pas moins assez peu pratique pour le novice (qui constitue généralement le lectorat de la collection).



Autre problème, que je ne m'explique pas : deux auteurs apparaissent sur la couverture du livre, Jean Bottéro et Marie-Joseph Stève. Or, on n'a jugé bon de consacrer une présentation qu'au seul Jean Bottéro en début d'ouvrage...



Pour terminer, je me dois d'ajouter que j'ai acquis ce livre lors d'un désherbage de la bibliothèque municipale. C'est donc une édition de 1993 que je possède. Aussi, il n'est fait que peu allusion à la situation difficile que connaissait alors l'Irak, et qui devait irrémédiablement avoir des conséquences sur l'avenir des fouilles archéologiques des sites mésopotamiens. Aujourd'hui, après deux guerres, l’occupation militaire américaine et les massacres, enlèvements, viols et génocide perpétrés par Daesh, la situation est forcément beaucoup plus dramatique que celle évoquée à la fin du texte. Une nouvelle édition est parue en 2009 (que je m'efforcerai de trouver et de lire), mais elle est forcément encore en décalage par rapport à l'actualité de ce début d'année 2015.
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Il était une fois la Mésopotamie

Ce livre retrace non pas l’histoire d’une civilisation : la Mésopotamie, mais celle de sa redécouverte, nos connaissances en la matière s’étant longtemps limitées à la Bible ou aux récits des historiens grecs : la Tour de Babel identifiée à Babylone ; Nabuchodonosor qui conquit Jérusalem et déporta des juifs ; Assurbanipal, le dernier grand roi assyrien, fondateur de Ninive, et dont le nom devint Sardanapale, symbole de débauche, de mœurs efféminées, d’un orient tout à la fois indolent et cruel, brutal et raffiné ; les Mèdes ou les Achéménides, etc. L’écriture cunéiforme resta longtemps pour le voyageur un mystère insoluble et il fallut attendre le 19ème siècle et le patient travail de « déchiffreurs » pour commencer à en apercevoir la portée. On remonta plus loin dans le temps, sur les traces de civilisations qui avaient apporté l’écriture mais aussi l’irrigation et l’agriculture, l’urbanisme, l’astronomie, les mathématiques… De même on exhuma des sables, entre les cours de l’Euphrate et du Tigre, les vestiges d’anciennes villes, de palais et de temples, avec comme gardiens des statues monumentales de taureaux à tête d’homme, de lions ailés, ou de dragons à la gueule de serpent. Jean Bottéro et Marie-Joseph Stève nous invite donc à partager leur travail et leur passion pour ces civilisations oubliées qui marquèrent une étape décisive sur le chemin de l’humanité.
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Il était une fois la Mésopotamie

L'actualité archéologique irakienne dont l'édition 2009 se fait l'écho dans les annexes jointes aux dernières pages du livre, est à mon sens l'un des meilleurs moyens d'accéder à cette lecture, plutôt que de l'attaquer par les mystères de l'épigraphie sumérienne des premiers chapitres qui pourraient rebuter celui qui s'y plongerait sans préliminaires, ce serait bien dommage.



Le Musée national d'Irak raconte à lui seul combien la conservation des objets ou des monuments du passé retrouvés sur son sol reste précaire et toujours susceptible d'être bouleversée par une actualité qui, ces dernièrs mois, a révélé le pire. Fermé en 1991, lors de la première guerre du golfe, il avait rouvert en 2000. Fermé à nouveau lors de la deuxième guerre, en 2003, vandalisé et pillé, il a de nouveau réouvert ses portes, en 2009. Cependant, pour ce qui concerne les objets du Musée national : seuls 6000, sur les 15000 volés, ont retrouvé leur place.



Revenons au début. La Mésopotamie, il faut l'apprivoiser par un peu de géographie. La carte (p.105) représentant les principaux chantiers de fouilles ouverts depuis le XIXe siècle, permet de visualiser d'emblée, l'ampleur et l'ensemble des sites archéologiques sous leurs anciennes appelations. Du delta du golfe persique entre les rives du Tigre et de l'Euphrate, soit le pays de Sumer proprement dit, puis en remontant vers le nord, la babylonie, le royaume d'Accad et plus haut encore l'Assyrie, c'est une grande partie de l'Irak actuel, les Monts Zagros côté iranien à l'est et les sables du désert de l'autre.



Mais le travail des linguistes et les épigraphistes ayant précédé celui des archéologues, c'est d'abord le récit des innombrables et fascinantes péripéties, parfois burlesques, ayant accompagné le déchiffrement de l'écriture sumérienne que nous relate Jean Bottero par étapes patientes et progressives, dans les deux premiers chapitres, avant de faire celui des fouilles archéologiques, beaucoup plus spectaculaires, commencées au milieu du XIXe siècle et qui tentent de se poursuivre aujourdhui, malgré les aléas de l'histoire.



Aventure d'un déchiffrement extraordinaire qui a commencé sous l'impulsion d'un simple professeur de latin de Göttingen, Georg Grotefend (1775-1853), dont la curiosité et les intuitions géniales vont permettre de lever les tous premiers mystères de trois écritures impénétrables appelées à l'époque "persépolitaines" et relevées, pour la plupart en Perse, grâce aux pérégrinations de voyageurs intrépides qui en ont rapporté des spécimens. Grotefend repère un système syllabique simplifié, proche de l'avestique, dans l'une des trois colonnes d'inscriptions d'un document trilingue publié qu'il étudie particulièrement et déchiffre partiellement en 1802-1803. La Société Royale des Sciences de Göttingen refusera d'homologuer son travail.



Vingt ans après, un officier de l'armée des Indes, Rawlinson, va parachever ce déchiffrement initial, grâce à la découverte en 1835, à Behistun au sud-ouest d'Ecbatane (Hamadan), de nouvelles inscriptions rupestres faisant le récit trilingue, en plus de quatre cents lignes, d'une scène de soumission commémorant une victoire de Darius, roi des Perses de 521 à 486, et dont il effectue le relevé minutieux. Concluant le travail de Grotefend, il vient à bout du déchiffrement de ce qu'il est convenu d'appeler le vieux perse. Le déchiffrement de l'élamite, deuxième des écritures à laquelle doivent se colleter les savants, est conforté ultérieurement par les découvertes archéologiques faites plus tard à Suse, et constitue une autre étape de cette aventure épigraphique qui va conduire à Sumer.



La dernière écriture de ces documents trilingues semblait la plus hermétique et suscitait maintes interrogations sur une éventuelle origine sémitique. On en fit découler l'assyrien. Il n'en était rien mais l'Assyriologie était née. Au plus fort du déchiffrement, de multiples tablettes d'argile et autres documents gravés de signes similaires sont exhumés du sol mésopotamien, enrichissant de tous leurs clous, les connaissances. Finallement, après bien des vicissitudes et des querelles linguistiques, une nouvelle inscription de huit cent neuf lignes venant d'Assur, lèvera le secret sur cette prodigieuse écriture cunéiforme. Cent deux ans après Grotefend, François Thureau-Dangin (1872-1944) met tout le monde d'accord en 1905, en publiant "Les inscriptions de Sumer et d'Accad". Le sumérien est reconnu pour sa cohérence et son fonctionnement propre, ayant précédé toutes les autres écritures connues alors.



Côté archéologie, le texte est tout aussi prenant. La lecture des documents annexes est l'occasion de s'immerger dans l'archéologie du XIXe siècle et des surprises qu'elle peut réserver, avec les extraits des premiers récits de fouilles d'Austen Henry Layard ou de Victor Place, consul de France à Mossul en 1852 ; ou encore, le récit de l'archéologue Max Mallowan (époux d'Agatha Chrisitie), retraçant ses souvenirs des fouilles du chantier de Ninive. Documents qui participent de ‎la mise en condition de la lecture. Ce qui frappe ici c'est l'internationalisation rapide des fouilles et la successions de découvertes ininterrompues :



La mise au jour de la résidence de Sargon II, roi de Syrie (721-705 av. J.-C.), à Khorsabad par Paul-Emile Botta, agent consulaire français nommé en 1842 à Mossul et pionnier des fouilles en Mésopotamie, initie un mouvement d'ampleur internationale où le premier enthousiasme pour les ruines se transforme très vite, sous l'impulsion des Allemands, en une science rigoureuse et systématique. Le musée assyrien du Louvre ouvre ses portes. Victor Place, nommé Consul de France à Mossul en 1852, prend le relai des fouilles de Khorsabad. En 1877, Ernest de Sarzec, vice-consul à Bassorah est conduit sur le site de Tellô où les fouilles permettent de recueillir 50 à 60000 tablettes qui faciliteront aussi le déchiffrement du cunéiforme.



Les Anglais fouillent les ruines de Nimrud, pensant découvrir Ninive qui est mise au jour en 1849-1850 et révèle la découverte exceptionnelle des 25000 tablettes d'argile de la bibliothèque d'Assurbanipal (668-627). A soixante km au sud-est d'Uruk, Ur est identifiée dès 1854, mais les fouilles ne commenceront qu'en 1922. La découverte spectaculaire du cimetière royal d'Ur fouillé entre 1926 et 1931, dont les trésors sont aujourd'hui au British Museum, marque la fin d'une époque. Après la seconde guerre mondiale les fouilles viseront aussi des sites régionaux de moindre importance, mais non moins intéressants, notamment en Assyrie et dans la région de Bagdad. L'archéologie Irakienne a pris son essor et s'est jointe au concert international. La préhistoire mésopotamienne commence d'être explorée.



Les fouilles allemandes, pionnières en Irak d'une archéologie scientifique, se sont concentrées sur Assur, Uruk et Babylone dont la porte d'Ishtar est aujourd'hui au Vorderasiatisches museum de Berlin. A Assur, au nord, le passé archéologique du site a été reconstitué sur plus de deux millénaires, strates par strates. A Uruk (Warka), entre Bagdad et Bassorah, le chantier commencé entre 1913 et 1914 puis interrompu par la guerre a repris en 1928, à nouveau interrompue par la guerre. La fouille d'Uruk, inachevée à ce jour, est interrompue à nouveau en raison de la situation politique. Nippur, à cinquante km au sud-est de Babylone est un chantier confié aux Américains entre 1889 et 1900, qui fouillent aussi la vallée de la Diyâlâ dans les années trente. Mais cette internationalisation des fouilles a-t-elle constitué une protection ? Non, est-on tenté de répondre.



Car, l'état de la plupart des très nombreux sites archéologiques de l'ancienne Mésopotamie est très critique aujourd'hui. Ils sont extrêmement menacés (pillages et destructions). La situation s'étant dégradée depuis les deux guerres et la proclamation de l'EI plus récemment, notamment dans la région de Mossoul (Ninive, Nimrud) comme plus au sud (Nippur, Uruk, Ur etc.). Les chercheurs Irakiens et les équipes internationales qui tentent malgré tout de travailler sur place le font dans des conditions particulièrement difficiles et ne cessent d'alerter à leur sujet.



Une lecture incroyablement voyageuse, à nulle autre pareille.





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Il était une fois la Mésopotamie

La petite collection « Découvertes Gallimard » m'enchante . Elle est le tremplin idéal lorsqu'on veut aborder un sujet encore mal connu . Les textes sont de qualité , ici il est signé de Jean Bottero qui est une « pointure » dans le domaine et les illustrations , bien que de petit format , sont riches et attractive. Ce volume est surtout consacré à l'épopée que fut le travail des archéologues et autres chercheurs pour ramener au jour cette prestigieuse civilisation. J'ai beaucoup appris dans ce livre et j'ai pu ensuite me lancer plus avant .
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Il était une fois la Mésopotamie

L'une de mes premières rencontres avec la Mésopotamie et sans doute ma première découverte de Bottero. Ce livre ne parle pas de la vie à Mari, Ur, Babylone ou Uruk, mais d'une histoire tout aussi passionnante, la redécouverte de ce monde enfouie.



J'avais une dizaine d'années lorsque je l'ai lu pour la première fois. J'ai beaucoup aimé les documents qui accompagnaient les textes.



Maintenant, j'aurais tendance à considérer qu'il s'agit d'un bon travail de vulgarisation par l'un des spécialistes de la Méditerranée orientale. Une histoire de l'archéologie ou, plus largement, de la redécouverte de la Mésopotamie et de ses trésors.



Après toutes ces années, malgré mes études, je redécouvre toujours avec plaisir ces pages. C'est un peu l'une de mes madeleines de Proust (qu je devais sans doute lire en mangeant des madeleines de ma mère d'ailleurs).
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Il était une fois la Mésopotamie

L'on ne présente plus "Jean Bottéro" assyriologue de renommée internationale, spécialiste de la Bible et du Moyen-Orient antique.

Avec "Il était une fois la Mésopotamie" l'auteur et Marie-Joseph Stève également éminent orientaliste, nous faisons découvrir les objets, sites, de l'époque mésopotamienne, qui ont été découverts à la fin du XVIIIe siècle.

Le livre comporte de nombreuses photos intéressantes pour compléter les connaissances visuelles.

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