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Citation de cathcor


Marie Morel

robert morel




Je me rappelle

quand tu nous emmenais à l'école

et qu'on était toujours en retard

car on se promenait

dans les champs

pour aller voir les herbes d'anges

et on aimait ça tous les deux

tellement.



Je me rappelle

ta peau sèche d'écailles

de petit lézard rose.

Je me rappelle ta peau sèche

qui craquait de partout

comme une terre sans eau

dans ce grand désert

de la vie.



Je me rappelle tes odeurs

Je me rappelle

ton orange aux clous de girofle

Je me rappelle tes odeurs,

tu sentais toujours un mélange d'ail,

de clou de girofle, de cumin

et d'autres odeurs puissantes.



Je me rappelle

que tu trompais maman

avec presque toutes

tes secrétaires

et tes auteurs

et tes amies

et ça faisait des tas d'histoires

à la maison,

et le drame éclatait entre toi

et maman

comme le tonnerre

sur la tête des enfants.



[ ...]



Je me rappelle

tes habits

que maman te dessinait,

elle avait inventé ta poche crayon,

tu étais si beau

et si rare avec.

Je me rappelle

tes bonnets

que maman

te crochetait en y accrochant

les médailles

de la Vierge.



[ ...]



Je me rappelle

que tu détestais la violence

et la guerre

et la haine

et le racisme,

et le mal sur la Terre,

et que tu en étais profondément

malheureux.

Je me rappelle

que tu faisais croire

que tu étais juif

pour être plus près de ceux

qui ont souffert.

et j'étais fière de mon papa

Juif.



[ ...]



Je me rappelle

que nos créations d'enfants

étaient pour toi aussi importantes

que des créations d'adultes

et tu nous regardais

avec beaucoup de respect

dans nos actions.

Je me rappelle que tu étais toujours admiratif

de tout ce que l'on faisait

et que tu nous donnais du courage pour faire

des tas de choses.



[ ...]



Je me rappelle

des gens incroyables

qui passaient sans arrêt

au Jas pour vous voir.

Parfois on n'en pouvait plus

et on s'enfuyait dans l'hôtel voisin.



Je me rappelle

qu'il t'arrivait de faire croire

que tu n'étais pas Robert Morel,

Tu disais "Il n'est pas là aujourd'hui",

et les gens repartaient

déçus

de ne pas t'avoir vu.



Je me rappelle

que quand il y avait des cars

tu prenais le tuyau d'arrosage

pour faire fuir cette foule de curieux

qui t'empêchait

de travailler



Je me rappelle

le JAS

notre petit village

que toi et maman aviez reconstruit,

pour y vivre

et travailler en paix.



Je me rappelle

le Jas

et toutes ses pierres,

différentes et belles.

Je me rappelle

les murs de pierre

et les toits en lauze.



[ ...]



Je me rappelle

mon papa,

avec ses trois enfants

François, Marie et Eve,

et avec Odette,

tous ces moments forts et intenses

que nous avons vécus

ensemble."

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