Là au milieu de l’eau, au milieu de nulle part en Écosse, j’ai rejoint quelque deux cents triathlètes pour prendre le départ d’une course à priori hors norme, un ironman extrême. Le départ est donné, et je n’existe plus. Je m’oublie complètement et je décide de laisser toute ma vie de côté, le temps d’une journée. J’ai encore du travail sur moi-même à faire… Mais petit à petit, je vais me trouver.
Lorsque je participais aux courses, il n’y a qu’en ultratrail ou ultratriathlon que je pouvais dire : « Je prends mon temps. » Je faisais croire à tout le monde que je gérais la course, en fait j’appréciais la lenteur du chemin, bien ancrée dans la terre. Chaque minute perdue était un précieux cadeau pour moi-même.
Personne ne me jugeait, la nature me laissait aller comme je le voulais, elle me laissait traîner des pieds, courir comme une folle, trottiner en pleurant. Elle ne me jugeait jamais sur mon humeur du jour, sur ma journée de travail ou bien sur la colère que je pouvais ressentir contre quelque chose ou quelqu’un.
L’expérience des courses ultra, de longue distance, comme Paris-Brest-Paris ou le Celtman, m’aidait énormément à progresser, à voir plus clair, sans que je sache vraiment pourquoi. C’était comme ouvrir une porte sur moi-même.
J’écrasais sous le poids des convenances, de la société, de ce qu’on attendait de moi. Ma vie m’échappait, je sentais que je rentrais dans le moule et ça m’effrayait.
Tout mon être hurlait pour exister. Je ne pouvais qu’écouter, j’étais lancée. J’allais continuer et trouver les clefs du bonheur.