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Citation de mimo26


La ville m’encercle, comme un panorama. Les bras tendus, je ne peux m’empêcher de tourner sur moi-même pour embrasser la vue. Je profite du spectacle, bien consciente que c’est peut-être la dernière chose que je verrai jamais.

Je fixe les quatre marches métalliques devant moi, qui m’ont l’air bien fragiles et délabrées avec leur rouille, leur peinture écaillée et leurs lattes mal fixées. Je pose le pied sur la première, elle cède et je tombe.

Pourtant, je n’ai pas le choix, je dois monter.

Je me relève, pose les mains sur les rampes et je reprends. Mes paumes, moites et glissantes, m’empêchent de me cramponner. Je trébuche sur la deuxième marche, recommence. J’appelle à l’aide, d’une voix brisée, que je ne reconnais pas.

Lorsque j’atteins la corniche du toit, mes genoux flanchent. Au prix d’un ultime effort, j’évite de basculer dans le vide et d’atterrir sur le trottoir. Seize étages plus bas.

L’immeuble est si haut que je pourrais toucher les nuages. Une sensation de vertige s’empare de moi. Le sol se rapproche à toute allure, les immeubles et les arbres se mettent à se balancer au point que je ne sais plus ce qui bouge : eux ou moi. Des petites boîtes d’allumettes jaunes filent dans les rues de la ville. Des taxis.

Si je me tenais au rez-de-chaussée, la corniche me ferait l’effet d’un boulevard. Mais ici, c’est tout le contraire. Ici, ce n’est qu’un fil sur lequel j’essaie de tenir en équilibre malgré mes jambes qui flageolent.

J’ai peur. Mais j’ai déjà fait tout ce chemin. Je ne peux pas reculer.

Une accalmie survient et s’achève si vite que je ne la remarque presque pas. L’espace d’une seconde, le monde est immobile. Je suis en paix. Le soleil monte toujours plus haut dans le ciel, ses rayons jaune orangé qui percent à travers les immeubles m’éblouissent, m’apaisent et me réchauffent. Mes mains s’élèvent tandis qu’un oiseau passe à tire-d’aile. Les bras tendus de part et d’autre de mon corps, j’imagine quel effet ça ferait de voler.

Puis tout me revient.

Je suis désespérément seule. Mon corps entier me fait souffrir. Je n’ai plus toute ma tête, je n’y vois plus clair, je ne peux plus parler. Je ne sais plus qui je suis. À compter que je sois encore quelqu’un.

Et j’en ai alors l’intime conviction : je ne suis personne.

J’imagine ce que ça ferait de tomber. Plonger en apesanteur, laisser la gravité prendre le relais, lâcher prise. Renoncer, s’abandonner à l’univers.

Je perçois un mouvement plus bas. Un éclair brun, et je sais que si j’attends encore il sera trop tard. La décision ne m’appartiendra plus. J’appelle une dernière fois.

Puis je me lance.
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