Ce qui retient par le dos l'enfant immigré, ce qui lui enlève toute envie, tout désir de connaissance, de possession, c'est qu'au fond de lui, il sait qu'on l'a autorisé à rejoindre son père en un exil lointain pour, plus tard, prendre le même chemin que lui. Pourtant, il est différent : le père est docile, secret, l'enfant à la rage, la haine... Il porte en lui l'idée que ce n'est ni l'admiration, ni la reconnaissance de l'effort du père qui a conduit à regrouper sa famille. il y a de la besogne, d'immenses chantiers... On sera du bétail comme nos pères, mais avec un cartable sur le dos.
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