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Citation de Charybde2


Denise et moi quittâmes Paris sans grands effets, deux sacs à petit fourniment. La compagnie des trains accorde aux chiens une place singulière : ils paient leur billet sans avoir de siège, ce qui fait d’eux des demi-bagages et des demi-passagers, ni l’un ni l’autre, quelque chose d’hybride. Le prix est en fonction de leur masse. Dans le cas de Denise, il en coûtait la moitié d’un billet plein tarif. Les chiens compostent puis, muselés, se placent comme ils peuvent sous les sièges, là où s’effleurent les jambes des usagers. À mes pieds, le grand corps du bouvier n’y tenait pas, un peu de sa salive moussant par-dessus les coutures de sa muselière, s’épongeant sur la moquette du rapide, son fessier réchauffant les souliers de mon voisin, le contraignant à ne pas étendre plus loin ses jambes. Homme courtois, quoique attaché à ne rien céder de ses aises, s’efforçant avec nombre signes de rendre manifeste l’extrême limite de sa philanthropie, si bien que je me résignai à ranger Denise autrement, la poussant dans la travée centrale, là où passent les gens avec d’énormes bagages à roulettes bien après que le train a démarré, quand il va déjà à plein régime. Elle encombrait, incontestablement, étendue dans le couloir, neutralisant le flux. Je la poussais chaque fois au passage des grandes valises, elle se relevait d’un coup de rein comme font les chameaux du désert avant qu’elle ne replonge entre mes jambes pour s’époiler contre celles du voisin. Elle avait cette gaine de cuir à la gueule, pour moi le poignet garrotté par la laisse, nous allions aux forêts du Vaucluse.
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