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Citation de albane9


p. 12 à propos de Nawal, la militante salmyrienne
Je puise mon courage des femmes, très nombreuses à être sorties de chez elles et à s’exposer avec des bébés en bas âge dans les bras ou de jeunes enfants à la main, aussi naturelles que si elles allaient faire des courses ! Avant de quitter l’appartement, j’ai donné la consigne formelle à Hussein et à Ishtar de ne mettre le nez dehors sous aucun prétexte, et même de sécher les cours ! Je crains de les offrir en pâture aux têtes brûlées qui pourchassent les activistes de mon acabit. Je ne suis pas sûre qu’ils bénéficieraient de la protection de Nihad, leur père dont je suis séparée depuis six mois. Notre parti pris de pacifisme, notre refus de riposter à la violence par la violence vont à coup sûr mettre à cran tous les caciques du régime. Nos armes sont le nombre et l’unité. Nous savons tous que du sang coulera encore longtemps avant qu’ils ne déguerpissent, une fois lâchés par les exécutants de leurs basses œuvres. La semaine dernière, ils ont fait abattre des soldats qui n’ont pas tiré sur la foule, et sur les réseaux sociaux circulent des rumeurs de désertion d’officiers de l’armée, proches des hautes sphères du pouvoir. Je me mets à espérer que très bientôt Nihad franchira le pas, même si au fond de moi j’ai toujours su que son soutien inconditionnel à la dictature lui offre l’occasion d’assouvir impunément ses pulsions les plus brutales. (p. 12-13)

Lorsque l’étau se resserre autour d’un opposant, lorsque la pieuvre s’installe et menace de l’étouffer, il ne lui reste plus qu’à déménager pour tenter de leur échapper. À trouver un logement dans un autre quartier, sans donner à personne sa nouvelle adresse. Mais comment annoncer et imposer un tel bouleversement à mes enfants amoureux de leur luxe ? Comment leur faire accepter des consignes de prudence dignes de conspirateurs ? Pour desserrer le nœud qui m’étreint la gorge et lutter contre la folie qui s’invite, je me dis que je devrais me lancer dans l’écriture du roman total de la révolution, au-delà de la compilation sinistre des morts qui dénonce les diktats de l’oppresseur. Au-delà de mon cas personnel. Il faudrait impérativement pénétrer au fond de tous ses acteurs, sans exception, sans tabou, sans se cantonner aux valeurs héritées des Lumières, qu’elles viennent de l’Occident ou de l’Orient. Dans cette guerre civile, c’est une fois de plus l’homme dans son intégralité qui est en question. (p 67)

P 98 à propos de Souleymane le djihadiste français
Parmi les émissions télévisées, celle qui a les faveurs de Souleymane, Le Repos du djihadiste, montre des combattants assis par terre autour d’un café ou d’un thé partagés, sur fond d’hymnes islamiques a capella, dans le strict respect de la loi. Ils racontent sincèrement la rédemption qui les a conduits à faire le djihad, dans une ambiance de franche camaraderie virile. Où donc pourrait se nicher la monstruosité de ces hommes courageux ? (p. 98)

p. 121 à propos de Christophe le journaliste français
Christophe se revoit dans son école de journalisme : Pierre Robert, le célèbre reporter de guerre, énumère les qualités requises pour accomplir au mieux ce métier ingrat : être maître de soi, mettre entre parenthèses ses émotions devant toutes les scènes impensables de sauvagerie primitive révélée lors de chaque conflit. Surtout ne pas tomber dans l’empathie, mais garder son sang-froid pour shooter efficacement, faire corps avec l’objectif de son appareil de photo, voir à travers lui, penser au cadrage pour fixer ces moments de pure cruauté. (p. 121)
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