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Citation de tolstoievski


Ce fut certainement l’une des obsessions artistiques de Hemingway : saisir la structure de la conversation réelle. Essayons de définir cette structure en la comparant avec celle du dialogue théâtral :
a) au théâtre : l’histoire dramatique se réalise dans et par le dialogue ; celui-ci est donc concentré entièrement sur l’action, sur son sens, son contenu ; dans la réalité : le dialogue est entouré par la quotidienneté qui l’interrompt, le retarde, infléchit son développement, le détourne, le rend asystématique et alogique ;
b) au théâtre : le dialogue doit procurer au spectateur l’idée la plus intelligible, la plus claire du conflit dramatique et des personnages ; dans la réalité : les personnages qui conversent se connaissent l’un l’autre et connaissent le sujet de leur conversation ; ainsi, pour un tiers, leur dialogue n’est jamais entièrement compréhensible ; il reste énigmatique, telle une mince surface du dit au-dessus de l’immensité du non-dit ;
c) au théâtre : le temps limité de la représentation implique une économie maximale de mots dans le dialogue ; dans la réalité : les personnages reviennent vers le sujet déjà discuté, se répètent, corrigent ce qu’ils viennent de dire, etc. ; ces répétitions et maladresses trahissent les idées fixes des personnages et dotent la conversation d’une mélodie spécifique.
Hemingway a su non seulement saisir la structure du dialogue réel mais aussi, à partir d’elle, créer une forme, forme simple, transparente, limpide, belle, telle qu’elle apparaît dans Collines comme des éléphants blancs : la conversation entre l’Américain et la jeune fille commence piano, par des propos insignifiants ; les répétitions des mêmes mots, des mêmes tournures traversent tout le récit et lui donnent une unité mélodique (c’est cette mélodisation d’un dialogue qui, chez Hemingway, est si frappante, si envoûtante) ; l’intervention de la patronne apportant de la boisson freine la tension qui, pourtant, monte progressivement, atteint son paroxysme vers la fin (« s’il te plaît s’il te plaît »), puis se calme en pianissimo avec les derniers mots.

Cinquième partie : À la recherche du présent perdu.
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