voici le tout début du texte :
« Au gré de son souffle printanier, le vent s’est plu à transporter le pollen jusqu'aux femelles voisines de ce rivage de la rivière de Loire, comme elle était nommée en ces temps-là. Peut-être même à des voisines d'en face, de l'autre rive, la rive gauche.
Un peu plus d'une lunaison plus tard, leur union consommée, les belles femelles peuplier noir, entièrement parées de fleurs blanches cotonneuses, ont libéré les fruits de leurs amours, par milliers. Ces graines, aussi douces que légères, le vent les porte en volutes enneigées. Le ciel se transforme alors en un voile de coton plumetis.
En ces dernières journées printanières de l'an 1856, à la faveur probable d'un vent d'ouest, cette danse dans le vent s'est achevée dans la rivière de Loire, au Mesnil, au bout du bout du Mesnil, rive droite, sur ce qui fut sans doute à une période le chemin de halage, à quelques encablures de l'ancienne gare à bateau de la Ronce.
Qu'importe pour ces graines tombées à l'eau, un coton hydrophobe les protège de l'immersion. Rassemblées en flottaison à la surface tel un blanc matelas, elles s'impatientent déjà du bonheur d'atterrir enfin. Les graines s’amassent peu à peu en longs rubans blancs qui ne demandent plus qu'à trouver un port d'attache. »