(p. 162)
Pour les étudiants en médecine, se plonger dans le récit des médecins qui les ont précédés, ce n'est pas faire de l'histoire de la médecine au sens où l'entendent les historiens, c'est se soucier du cheminement de la pensée médicale depuis les origines de l'humanité. S'interroger sur les croyances primitives, comprendre les hésitations, les doutes, les erreurs des anciens, aide à se rapprocher de la conception que les malades se font, actuellement, de leur maladie et des réticences qu'ils peuvent avoir vis-à-vis de tel traitement, de telle vaccination. C'est aussi en lisant les descriptions de maladies, souvent plus fines et plus précises dans les ouvrages anciens que dans ceux que l'on étudie aujourd'hui que se développent le goût de la clinique, la finesse des diagnostics sans l'aide d'examens complémentaires. L'analyse critique des jeunes médecins, ainsi alimentée par ce regard sur le passé, se développerait d'une façon plus humaniste en s'opposant aux apprentissages qui privilégient l'abord scientifique et biomédical de la maladie.
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Le souci de l'autre, l'empathie ont pris place dans tous les services hospitaliers. Je me souviens des salles communes d'un grand hôpital parisien, où je faisais un stage d'externe il y a cinquante ans. Chaque salle, de format rectangulaire, contenait vingt lits, dix sur chaque mur de la longueur. C'est de cette organisation en salles communes de vingt lis que vient le nom de l'hôpital Quinze-Vingt (quinze salles de vingt lits, soit trois cents places), qui affichait une belle innovation lors de sa création, en 1260, par Saint-Louis : il était destiné aux nombreux aveugles revenant des croisades.