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Citation de mh17


Nous sommes cinq frères et sœurs. Nous n’habitons pas la même ville, certains d’entre nous résident à l’étranger: et nous ne nous écrivons pas souvent. Il arrive que, quand nous nous rencontrons, que nous nous montrions, les uns envers les autres, indifférents ou distraits. Mais il suffit, entre nous, d’un mot. Il suffit d’un mot, d’une phrase; une de ces phrases maintes fois entendues et répétées dans notre enfance. Il nous suffit de dire « Nous ne sommes pas venus à Bergame pour rigoler » ou « De quoi qu’ ça pue l’acide sulfurique ? » pour retrouver tout à coup nos ancien rapports, notre enfance et notre jeunesse, indissolublement liées à ces phrases, à ces paroles. L’une quelconque de ces phrases ou de ces paroles nous permettrait de nous reconnaître dans l’obscurité d’une grotte, au milieu de milliers de personnes. Ces phrases sont notre latin même, le vocabulaire de nos jours, elles sont comme les hiéroglyphes des Égyptiens ou des Assyro-babyloniens, le témoignage d’un noyau vital qui a cessé d’être mais survit dans ses textes, sauvés de la fureur des eaux et de la corrosion du temps. Ces phrases constituent le fondement de notre unité, une unité qui subsistera jusqu’à notre mort, qui se recréera et ressuscitera dans les endroits les plus divers de la terre, quand l’un de nous dira :
- Illustre monsieur Lipmann, et que, sur-le-champ, résonnera à notre
oreille la voix impatientée de mon père :
- Finissez-en avec cette histoire ! Je l’ai entendue des centaines de fois !
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