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Citation de Jeanmarc30


Le premier tiers du xxe siècle apparaît, avec le recul du temps, comme l’âge d’or du modèle républicain. Sans doute celui-ci s’est-il, pour l’essentiel, cristallisé dans les vingt-cinq dernières années du xixe siècle, mais l’affaire Dreyfus, au prix d’un certain nombre de déformations du réel fait figure de véritable acte de baptême du nouveau modèle politique. Ce qui n’a été jusque-là qu’adaptation contingente aux circonstances historiques prend désormais figure de véritable système de valeurs qui aboutit désormais à donner son armature morale à la République, au point d’oblitérer les conceptions antérieures qui n’ont pas eu la chance de bénéficier de la durée. Désormais, la République n’est plus seulement une forme de régime, mais elle devient véritablement une idéologie politique dont se trouvent exclus ceux qui n’en partagent pas les convictions. Sans doute ce modèle politique trouve-t-il une traduction institutionnelle dans la pratique, mise en place au cours des dernières années du xixe siècle, des lois constitutionnelles de 1875, mais celles-ci, fruit des circonstances, prennent au début du xxe siècle valeur de véritable dogme, au point que le modèle politique s’identifie à elles et que toute tentative de les corriger prend désormais figure d’attentat contre la République. Mais surtout, le modèle républicain s’appuie désormais sur une véritable culture politique diffusée par l’école de la République dans laquelle les conceptions philosophiques, les références historiques, l’organisation et les rapports des pouvoirs publics, les conceptions sociales forment un tout harmonieux, un véritable « écosystème » social, politique et idéologique qui explique la solidité du régime au début du xxe siècle. L’un des éléments les plus solides de ce système est le modèle social qu’il implique. À cet égard, si on ne peut totalement assimiler au niveau des pratiques la politique sociale des opportunistes qui gouvernent à ses origines la République des républicains et celle de leurs successeurs radicaux, le projet social demeure identique : il s’agit d’assurer, dans un cadre rendu favorable à l’évolution sociale par l’action de l’État, la promotion des meilleurs, des plus travailleurs, des plus aptes. C’est véritablement, dès la période des opportunistes, une nouvelle manière de poser les problèmes du contrat social qui ne permet pas d’écarter d’un revers de main la politique sociale des républicains des années quatre-vingt. Mais il est vrai que les fondements posés par les opportunistes seront développés avec plus de hardiesse par les radicaux. Au total, on peut parler véritablement d’un modèle social républicain dont le pouvoir d’attraction est considérable et répond avec une parfaite adéquation à l’état de la société française des débuts du xxe siècle. Le prestige de ce modèle républicain à son apogée ne se limite d’ailleurs pas au cas français et il nous est montré comment il peut constituer un article d’exportation en constituant un pôle de référence pour la pensée politique italienne qui, selon ses composantes, y adhère ou le rejette. Et, durant les années 20, si le modèle républicain théorique continue à nourrir la pensée de l’antifascisme, la comparaison de la réalité française avec le modèle qui est supposé l’inspirer est source de déceptions et constitue une pièce de plus à verser à la crise du modèle républicain.
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