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Citation de Cielvariable


Tout en m'essuyant les doigts, je me suis tourné vers la passerelle en planches qui conduit aux leviers où le vieux Joe Bush travaillait.

Une longue et large courroie est apparue dans le noir. Sur la courroie était posée une main, une main au bout d'un bras, un bras attaché à un corps. Et ce corps marchait vers moi.

Une faible leur l'environnait.

Je le vois encore.

Je le vois.

C'était une silhouette. Toute noire, si bien que je n'ai pas distingué de visage. Mais le corps était massif.

Qui ou quoi que ce fut, c'était grand et lent. Cela avançait pas à pas, cramponné à la courroie, une jambe traînant derrière.

Je me souviens de trois autres choses : la première, c'est que je ne pouvais pas émettre un son. Était-ce quelque force obscure qui me serrait la gorge, ou simplement la terreur? J'arrivai tout juste à respirer, et encore, péniblement.

La deuxième est que j'étais adossé à un garde-fou en bois, dans un angle qui dominait le vide.

La troisième, plus terrible que les deux premières réunies, c'est que mes pires cauchemars étaient devenus réalité. Dans un coin de mon esprit, je gardais la certitude qu'aucun des monstres que j'avais créés au fil des années dans mes histoires ne viendrait jamais m'emporter. Or, un monstre était là, et j'allais mourir de peur.

Quand il est arrivé assez près pour me toucher, j'ai vu remuer l'ombre de ses lèvres, sous le rebord de son large chapeau d'ouvrier. Et il m'a parlé :

" Le numéro 42 est à moi. Ne t'en approche pas. Je te surveille"

Alors, d'un coup, j'ai retrouvé ma voix. J'ai hurlé, j'ai pressé mon dos contre le garde-fou, et il a cédé. Les yeux levés, tandis que je tombais, je me suis aperçu que l'être qui s'était tenu devant moi était parti. Il avait disparu.

A moins qu'il n'ait jamais existé?

La vidéo montrant une jambe qui marche et une autre qui traîne derrière me le confirme : ce que j'ai vu cette nuit là était bien réel. Je ne peux en parler qu'avec Sarah, sinon, je serais bon pour la camisole de force. Avant l'accident, j'avais déjà l'impression que les gens m'observaient. Maintenant, c'est pire. Mes parents m'observent. Henry va arriver vendredi, et il m'observera. Gladys, avec son fusil de chasse, m'observe. Toute la ville m'observe. Le corbeau, derrière ma fenêtre, m'observe.

Et le spectre de la drague m'observe, j'en suis sûr.

Il attend.

Il me veut.
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