AccueilMes livresAjouter des livres
Découvrir
LivresAuteursLecteursCritiquesCitationsListesQuizGroupesQuestionsPrix BabelioRencontresLe Carnet
Citations de Philippe Martin (II) (14)


Un jeune Algérien, résidant en France, compose, en arabe, la chanson Sourate corona, pour inciter les jeunes à respecter les gestes barrières en inscrivant cette parole dans un univers musulman pour la rendre plus audible:
"Covid.
Et le virus mortel
Ils sont étonnés de le voir débarquer de la Chine lointaine
Les mécréants disent que c’est une maladie tenace.
Non, mais c’est la mort certaine.
Il n’y a point de différence entre les rois et les esclaves.
Accrochez-vous à la science et laisser tomber les traditions.
Ne sortez pas pour acheter la semoule.
Et restez chez vous, car c’est un malheur terrible.
Et lavez-vous les mains avec du savon neuf.
Ainsi, le grand Jilou [référence à Dieu] a dit vrai."

Il assure n’avoir voulu que s’adresser aux jeunes musulmans dans un langage qu’ils comprennent. Est-ce si sûr?

La cour correctionnelle du tribunal de première instance de
Tunis estime qu’il s’agit d’une parodie, que mettre des versets
du Coran en rythme est une transgression. Le 2 juillet, il fait
comparaître la blogueuse Emna Al-Chargui qui a partagé
la chanson avec une page du Coran en illustration. Elle est
poursuivie pour « atteinte au sacré et aux bonnes mœurs».
Commenter  J’apprécie          192
À Burglengenfeld, une cigogne sur un toit pousse de terribles cris; la maladie s’étant immédiatement installée, elle est surnommée «l’oiseau de la peste».

En 1584, un paysan de Bautzen entend d’affreux cris avant le début de l’épidémie. L’année suivante, les habitants de Görlitz voient des oies sauvages migrer en plein été ; quelques semaines plus tard, la peste ravage la cité. L’idée est si courante que des animaux passent pour annoncer le mal, spécialement le jaseur boréal et le cochevis huppé.
Commenter  J’apprécie          161
(Des) précautions auxquelles les haredim s’opposent avec force. Pensant que Dieu les protège en toute occasion,ils refusent bien des décisions sanitaires.

En 2018, l’épidémie de rougeole a fait des ravages dans la communauté Satmar du quartier new-yorkais de Williamsburg car ses membres s’opposent à la vaccination. Quand il est question de la Covid, ils sont tout aussi énergiques, spécialement à Bnei Brak, dans la banlieue de Tel-Aviv. Les dirigeants des communautés repoussent les règles sanitaires et incitent leurs fidèles à ne pas les respecter.
Commenter  J’apprécie          140
L’épidémie apparaît, obligeant les sociétés à se mobiliser pour déployer un arsenal sanitaire et médical. Les croyants peuvent alors penser à des
solutions spirituelles, qu’elles soient collectives, individuelles ou magiques. Enfin, le mal reflue et il faut penser à soigner les plaies.

L’épidémie ne laisse aucune société sereine. Elle bouleverse les cadres, elle triture les esprits.

Surtout elle accélère et elle révèle. Le lecteur va le voir, vivre et penser
l’épidémie c’est directement interroger la foi des hommes, la mettre à l’épreuve, confronter tradition et réalités. La maladie révèle aussi au grand jour les hostilités entre membres d’une même confession, les religions qui ne supportent pas les États et celles qui, au contraire y vivent.
Commenter  J’apprécie          140
L’autre intercesseur principal est Roch dont la vie est
contée dès le XIVe siècle. Il serait né à Montpellier vers 1350 et
mort à Voghera en 1378. Ayant vécu au temps de la Grande
Peste, son rapport avec la maladie semble évident, d’autant
plus que, de son vivant, il aurait été thaumaturge. Selon
un de ses hagiographes, il entre au service des pestiférés de
l’hôpital d’Aquependente en « s’appuyant sur la puissance de
Dieu, servoit & administroit aux malades, toutes les choses
qui leur estoient necessaires ». Grâce à lui, « la peste cessa
totalement ». Continuant à voyager en Italie, il se rend à
Césenne ; il y prie et la contagion disparaît. Appelé à Rome
par un cardinal malade, il fait le signe de croix sur son front
et « le restitua en sa primitive santé ». Arrivé à Plaisance, les
premiers bubons apparaissent sur son corps : il est infecté. La
population l’ayant rejeté, il s’exile dans une sombre solitude
où, tous les jours, un chien lui apporte un pain.
Commenter  J’apprécie          121
Nous nions la liberté des anciens pèlerins, leur faculté de se perdre en détours, de partir à l’aventure, de musarder et d’avancer à leur rythme ; nous refusons leur capacité à prendre leurs propres routes ; nous oublions leurs récits si différents les uns des autres pour nous réfugier entre les pages du récit unique d’Aimery Picaud, qui nous offre le confort d’une géographie linéaire.
Commenter  J’apprécie          80
Quand un pays entre dans l’Union, de nouvelles cartes apparaissent. Aux quatre routes d’Aimery Picaud s’est substitué un écheveau complexe qui part de Pologne ou de Grèce. En actualisant sans cesse le Camino, l’Europe se crée des racines, un moule par lequel tous les peuples seraient passés, une expérience médiévale commune préfigurant l’actuelle construction politique.
Le phénomène, depuis plus de vingt ans, s’autogénère.
Jacques a été si populaire par le passé qu’il est facile de trouver, dans la moindre région du continent, une chapelle, une statue ou le souvenir d’une confrérie.
La tentation est grande de tracer des lignes entre ces points épars. Et voilà le Camino, vous assure-t-on, qui se concrétise ! Si ce n’est que nous sommes victimes d’une reconstruction, voire d’une invention historiographique. Nous confondons le culte de l’apôtre et la dévotion pèlerine ; nous mêlons dans un passé idéalisé et intemporel des éléments qui n’ont jamais existé ensemble et se sont étalés sur plus d’un millénaire...
Commenter  J’apprécie          20
Disons-le nettement, Le Chemin, cette route unique qui aurait drainé les foules européennes vers l’apôtre, n’a jamais existé. Si, aujourd’hui, se développe une mystique du chemin, la circulation réelle est plus complexe. Il y a des étapes obligatoires, imposées par la topographie, comme le col de Roncevaux pour traverser les Pyrénées, ou par les capacités d’accueil, à l’image de l’hôpital d’Aubrac.
Entre ces points, chacun tente de trouver la route qui lui convient : parce qu’elle est facile, parce qu’il y trouvera un gîte, parce qu’il souhaite voir une relique, parce qu’il espère trouver un petit travail capable de nourrir son pécule...
Commenter  J’apprécie          20
On ne le dira jamais assez : méfions-nous des a priori ! Aujourd’hui, penser au Camino, c’est penser à la marche à pied. L’image est tellement ancrée dans nos imaginaires que nul ne penserait à la remettre en cause. Et pourtant ! Pendant des siècles, la plus sûre route pour Compostelle est la mer. Depuis l’Antiquité, les côtes espagnoles sont fréquentées.
À partir du XIe siècle, avec l’affirmation de royaumes chrétiens dans le Nord de l’Espagne, les ports cantabriques prennent une importance majeure dans les échanges européens : le trafic maritime favorise celui des pèlerins dont le transport devient une activité à part entière. Anglais, Suisses, Français, Flamands ou Allemands se rendent donc en Galice en débarquant si possible à La Corogne ; de là, reste environ 70 kilomètres en terrain assez aisé.
Commenter  J’apprécie          10
Le ciel était lourd. Mais les nuages qui s'amoncelaient à l'horizon n'annonçaient pas la pluie. Ils étaient le signe d'un orage d'acier qui s'était abattu une fois de plus sur un village lorrain. Des odeurs de mort imprégnaient les champs : sur les routes, des chiens, rendus cruels par l'atmosphère de massacre, poussaient des cris lugubres. Quelques femmes égarées et des enfants en pleurs erraient entre des ruines fumantes et des arbres qui depuis longtemps ne portaient plus de feuilles mais uniquement des pendus. Cela pourrait se passer en 1635 ou en 1655, pendant une de ces désastreuses années du XVIIème siècle lorrain; c'était la guerre de Trente Ans.
Commenter  J’apprécie          10
Benoît XVI, dans son discours du 6 novembre 2010, donne une dimension tout aussi spirituelle au Camino. Il s’unit aux pèlerins qui, « avec les empreintes laissées par leurs pas et pleins d’espérance, [...] tracèrent une route culturelle, de prière, de miséricorde et de conversion, qui s’est concrétisée par des églises et des hôpitaux, des hostelleries, des ponts et des monastères. C’est ainsi que l’Espagne et l’Europe acquirent une physionomie spirituelle marquée de façon indélébile par l’Évangile ». Les pontifes veulent évangéliser la route, faire de la marche un moyen d’arriver à une foi pratiquée et vivante.
La boucle est fermée : le Camino existe ! Chacun se plonge dans le Guide des pèlerins d’Aimery Picaud, si peu lu au Moyen Âge. Le livre donne raison aux rêves politiques ou associatifs et ancre dans le paysage nos idées de Compostelle. Il simplifie l’histoire, trace des itinéraires faciles à retrouver et à suivre, puisqu’on y trouve des marques. Voilà qui suffit à le faire passer pour l’ancêtre de nos cartes routières, et à jeter sur les routes les marcheurs.
Commenter  J’apprécie          00
La joie de la rencontre va-t-elle survivre à la cohabitation ? Aux ronflements la nuit, à ce qui est interprété selon les cultures comme un manque de savoir-vivre, à la brutalité de certains propos, aux rythmes de marche différents ? Va-t-on partager la nourriture transportée ?
Va-t-on attendre celui qui boite ? Vivre avec l’autre est une des principales questions. Chacun développe sa stratégie : un tel dédaigne celui qui a un gros appareil photographique, car il le prend pour un touriste ; un autre fuit celui qui arbore une croix, le jugeant trop catholique ; un autre encore déguerpit devant le porteur d’un piolet, parce qu’il estime que cet esprit sportif n’est pas celui du chemin... En fait, chacun cherche son « semblable », cet inconnu qui saura avoir la même vision du Camino.
Inconsciemment se forge un adage : « Dis-moi comment tu marches, je te dirai si tu es un des miens. » Car le marcheur espère toujours à composer un groupe qui va l’épauler. Tout se construit en fonction de l’opposition pèlerin-touriste, qui cache le dualisme vrai-faux. Chacun se range bien sûr du côté du « véritable pèlerin », mais ceux qu’il méprise n’en pensent pas moins de leur côté. Ainsi se forment des exclusions, alors même que tout concourt à les rapprocher face à ceux qui ne marchent pas.
Commenter  J’apprécie          00
Devenir pèlerin, c’est s’inscrire dans un discours ambiant, que ce soit pour l’accepter ou le contester. Un discours qui dessine le portrait du pèlerin, avec son sac, son bâton et, surtout, ses insignes : les coquilles, la croix de saint François, un tau... Parfois, c’est reprendre à son compte l’image que véhiculent de lui les médias. Parfois, c’est prendre la pose dans une ville, sous le regard des touristes, et se voir dans leurs yeux émerveillés, curieux, envieux... Les marcheurs ne savent pas se définir mais se devinent différents. Le choix de la tenue dit ce que sera le voyage. Il est la première rupture avec les habitudes de la vie en société. Le vêtement peut devenir une armure, une proclamation, un objet utilitaire... Il est figuration de soi-même. Celui qui tient un bourdon orné de coquilles se retrouve-t-il en celui dont l’habit couleur fluo sort d’un magasin de sport ?
Commenter  J’apprécie          00
Qu’il parcoure plus de 1000 kilomètres à pied en une fois ou qu’il répartisse son voyage sur plusieurs années, le pèlerin vit une « expérience liminoïde », selon le mot de Victor Turner. Il franchit un seuil, provoque une rupture, prélude à une initiation. Certains croyants font le pas radical de se retirer du monde pour devenir religieux, voire ermites. La majorité, sans aller jusqu’à un engagement aussi définitif, aimerait être capable d’atteindre à de hauts niveaux de spiritualité. Si les dévots et les mystiques multiplient les prières et autres exercices afin de libérer leur esprit, bien peu parviennent à une telle ascèse.

En revanche, tout le monde est apte au pèlerinage ; tout le monde peut, en un temps donné, sans renoncer à la vie qu’il mène, connaître un moment de « mysticisme extériorisé ». Même s’il ne ressent pas aussi radicalement la transcendance, le pèlerin renoue avec une vie intérieure à laquelle la société et le quotidien sont souvent peu propices. Il goûte à une liberté que ceux qu’il désigne comme « les autres » n’ont pas : celle d’exister en dehors des cadres sociaux, d’inventer le récit de sa propre existence.
Commenter  J’apprécie          00

Acheter les livres de cet auteur sur
Fnac
Amazon
Decitre
Cultura
Rakuten

Listes avec des livres de cet auteur
Lecteurs de Philippe Martin (II) (23)Voir plus

Quiz Voir plus

Autobiographies de l'enfance

C’est un roman autobiographique publié en 1894 par Jules Renard, qui raconte l'enfance et les déboires d'un garçon roux mal aimé.

Confession d’un enfant du siècle
La mare au diable
Poil de Carotte

12 questions
46 lecteurs ont répondu
Créer un quiz sur cet auteur

{* *}