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Citation de Lefso


Un carrosse richement décoré arrivait. Tiré par un splendide attelage, il s’arrêta sur la route poudreuse et un homme en descendit. Son pourpoint était entièrement déboutonné et sa chemise sortait à demi de ses chausses. Le chapeau dans la main droite et la gauche reposant sur le pommeau de son épée, il garda une semelle sur le marchepied pour embrasser une jolie jeune femme blonde penchée par la portière ouverte. Ce spectacle n’étonnait pas d’Orvand, qui leva cependant les yeux au ciel en voyant qu’un second baiser d’adieu était échangé avec une autre beauté, brune celle-là.
— Marciac, murmura le vicomte pour lui-même. Tu ne changeras donc jamais !
Le gentilhomme chargé de transmettre les récriminations du marquis de Brévaux retrouva ses amis tandis que le luxueux carrosse doré faisait demi-tour en direction de Paris et que Nicolas Marciac rejoignait d’Orvand. Il était bel homme, séduisant malgré le négligé de sa tenue et peut-être un peu grâce à cela, aurait eu besoin d’un coup de rasoir et souriait de toutes ses dents. Il trébuchait à peine et était l’image même du noceur ravi de sa nuit et insoucieux du lendemain.
— Mais tu as bu, Nicolas ! s’inquiéta d’Orvand en flairant son haleine.
— Non ! s’insurgea un Marciac très choqué… Enfin… à peine.
— Avant un duel ! C’est folie !
— Ne t’alarme pas. Ai-je déjà perdu un duel ?
— Non, mais…
— Tout ira bien.
Près de l’autre carrosse, le marquis de Brévaux était déjà en chemise et esquissait quelques fentes.
— Bon, finissons-en, décréta Marciac.
Il ôta son pourpoint, le jeta dans le carrosse du vicomte, dit bonjour au cocher, s’inquiéta de sa santé, fut ravi d’apprendre qu’elle était excellente, surprit le regard de d’Orvand, ajusta sa chemise dans ses chausses, dégaina son épée et alla vers Brévaux qui marchait déjà à sa rencontre.
Puis, après quelques pas, il se ravisa, tourna les talons sans se soucier d’exaspérer plus encore le marquis, et glissa à l’oreille de son ami :
— Dis-moi juste une chose…
— Oui ? soupira d’Orvand.
— Promets-moi d’abord de ne pas te fâcher.
— Soit.
— Alors voilà, j’ai deviné que je me bats contre celui qui est en chemise et me regarde d’un mauvais air. Mais pourrais-tu m’indiquer pourquoi ?
— Hein ? s’exclama le vicomte plus fort qu’il ne l’aurait voulu.
— Si je le tue, je lui dois bien de connaître le motif de notre querelle, ne crois-tu pas ?
Les mots manquèrent d’abord à d’Orvand, qui se ressaisit et annonça :
— Une dette de jeu.
— Quoi ? Je lui dois de l’argent ? À lui aussi ?
— Mais non ! Lui ! … C’est lui qui… Bon, en voilà assez. Je vais annuler cette folie. Je dirai que tu es souffrant. Ou que tu…
— Combien ?
— Hein ?
— Combien me doit-il ?
— Quinze cents livres.
— Diable ! Et moi qui allais le tuer ! …
Joyeux, Marciac s’en retourna devant le marquis qui fulminait. Il prit la pose d’une garde incertaine et lâcha :
— À votre disposition, monsieur le marquis.
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