Confluence T1 : Ce qui Naît des Abysses de Sylvie Poulain Un roman de science-fiction entre Avatar et Abyss qui vous plongera dans un monde immergé aussi léthal qu'envoûtant...
Ce qui Naît des Abysses est le premier roman d'une jeune et talentueuse autrice française, recrutée par Pierre Pevel pour le recueil du Paris des Merveilles. Ce sera une duologie : le 1er tome paraîtra le 1er février et le 2ème en septembre 2023
Résumé :
XXIVe siècle. Après l'emballement climatique et l'effondrement de la civilisation terrestre, les rescapés tentent de se réinventer sous l'eau au sein de cités sous-marines interdépendantes. Hélas, les vieilles tares de l'humanité ont plongé avec elle
En Atlantique Nord, la belliqueuse Atlantis flirte avec les limites de son mandat de protection, poussée par l'IA qui la dirige, tandis que les cargos sous-marins de la Hanse participent à de dangereux jeux d'influence. Les tensions se cristallisent autour de Providence, une mystérieuse colonie abyssale refusant de se soumettre.
Alors qu'une invasion tourne au désastre et que les secrets de Providence échappent aux Atlantes, un sous-officier, Wolf Douglas, découvre une jeune survivante nommée Jihane, qui ne ressemble à rien de ce qu'il connaît. Malgré tout ce qui les sépare, Wolf et Jihane sont forcés de coopérer pour survivre aux abysses, pendant qu'un sous-marin hanséatique s'efforce de récupérer les miettes du conflit. Pris dans un jeu de pouvoir qui les dépasse, le militaire et l'adolescente doivent bientôt faire des choix lourds de conséquences
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Pour moi, le dragon est ce que l’ail est à la cuisine méditerranéenne : j’en mets partout.

Imaginez des nuées d'oiseaux multicolores nichées parmi les gargouilles de Notre-Dame ; imaginez que, sur les Champs-Elysées, le feuillage des arbres diffuse à la nuit une douce lumière mordorée ; imaginez des sirènes dans la Seine ; imaginez une ondine pour chaque fontaine, une dryade pour chaque square ; imaginez des saules rieurs qui s'esclaffent ; imaginez des chats ailés, un rien pédants, discutant philosophie ; imaginez le bois de Vincennes peuplé de farfadets sous les dolmens ; imaginez, au comptoir des bistrots, des gnomes en bras de chemises, la casquette de guingois et le mégot sur l'oreille ; imaginez la Tour Eiffel bâtie dans un bois blanc qui chante à la lune ; imaginez de minuscules dragons bigarrés chassant les insectes au ras des pelouses du Luxembourg et happant au vol les cristaux de soufre que leur jettent les enfants ; imaginez des chênes centenaires, et sages, et bavards ; imaginez une licorne dans le parc des Buttes-Chaumont ; imaginez la Reine des Fées allant à l'opéra dans une Rolls-Royce Silver Gost ; imaginez...
On s'émerveille volontiers de la faculté qu'ont les chats à être discrets. Leur habileté à se faire remarquer est cependant tout aussi étonnante. lls sont là. Ils ne font rien d'autre qu'être là et attendre et pourtant - par le seul effet de leur volonté, semble-t-il - ils attirent à eux toute l'attention possible.
La promesse de l'aube faisait déjà pâlir l'horizon. Mais Paris dormait encore et la nuit n'était nulle part ailleurs plus souveraine que dans le grand cimetière du Père-Lachaise. Là régnait une obscurité silencieuse et immobile qui semblait ne jamais devoir finir. Caressés par la lueur des étoiles, les tombeaux et caveaux dessinaient un désordre de silhouettes ténébreuses livrées aux ronces, aux lierres, aux mousses, aux herbes folles. Des arbres nombreux dominaient ce dédale, des arbres dont les racines avaient au fil des ans bousculé les croix, incliné les stèles et fendu la pierre de monuments oubliés. Très mal entretenu, le cimetière de l'Est - c'est le nom officiel du Père-Lachaise - devenait dès le soir un royaume funèbre et désolé dont la quiétude apaisait moins qu'elle n'oppressait.
On amarra le navire à un vieux quai de pierre avant de descendre la passerelle. L'endroit était désolé, traversé par des rafales de vent hurlantes. Quatre soldats débarquèrent et attendirent au garde-à-vous sous l'orage qui éclaboussait leurs casques et leurs plastrons d'armure damasquinés. Un jeune homme les rejoignit. Il avait l'épée au côté, portait un large manteau dont la capuche dissimulait son visage. Suivi de son escorte, il alla jusqu'à la falaise d'un pas pressé et, par un escalier creusé dans la roche, entreprit de monter vers la forteresse qui coiffait l'île.
Ses sinistres remparts prolongeant la falaise contre lesquelles se fracassaient les vagues, Dalroth se dressait, massive et menaçante dans la tourmente des vents hurlants et des pluies diluviennes, illuminée et comme surgie du néant chaque fois que la foudre ouvrait une saignée écarlate dans le ciel nocturne.
Respectant un itinéraire choisi avec soin, il profitait encore du système d'éclairage nocturne imaginé par M. de La Reynie, le célèbre lieutenant de police du roi Louis XIV. Trente ans s'étaient avérés nécessaires à son installation et, désormais, quelques milliers de lanternes espacées pendaient à des cordes tendues en travers des rues. Elles étaient massives, en verre et tôle de fer, abritaient chacune une chandelle en suif d'un quart de livre qui brûlait quatre heures durant. Par mesure d'économie, on ne les allumait qu'aux mois d'hiver, vers 8 heures, de sorte qu'elles s'éteignaient peu après minuit sans être remplacées. Et encore n'illuminaient-elles que les principales artères de Paris. Partout ailleurs, c'étaient les ténèbres jusqu'à l'aube.
La mémoire est un ciment solide. Si solide et durable que la nostalgie survit parfois longtemps à l'amitié. Elle peut même s'y substituer et nous tromper. Combien de fois nous sommes-nous aperçus trop tard que rien ne nous attachait désormais à tel ou telle, sinon le souvenir d'une époque évanouie ? Quand cette idée frappe, douloureuse, le temps paraît faire un bond et nous nous découvrons subitement face à un étranger que les hardes de sentiments défunts ont cessé de déguiser. Cela, plus que les ans, fait que l'on vieillit. L'âge est le catalogue de nos désenchantements intimes.
- En politique, mieux vaut ne pas trop s'inquiéter des raisons qui motivent chacun. Seul le résultat compte, non ? Qu'importe si tel est guidé par l'intérêt et tel autre par l'ambition, s'ils parviennent à s'entendre ? Plutôt que de sonder le cœur des hommes, mieux vaut mesurer ce qui ressortira de leurs actes et ne pas trop faire la fine bouche. En politique, je doute que quoi que ce soit ait déjà été fait pour le bien commun par bonté d'âme.
L'innocence est toujours la première victime de la guerre.

Griffont prit son temps, la dégustation d'une bonne absinthe débutant avec le rituel de sa préparation. D'abord, verser une dose d'absinthe dans le verre. Poser l'indispensable cuillère percée sur le verre. Placer sur la cuillère un morceau de sucre blanc qui non seulement adoucira l'absinthe, mais en relèvera le goût. Passer ensuite à l'étape la plus délicate de la préparation et verser lentement, en un filet, goutte à goutte si possible, de l'eau très fraiche dans le verre. Pourquoi cette délicatesse ? Afin de permettre à l'absinthe de libérer toutes ses saveurs et de se troubler correctement […]
Ce fut une absinthe idéalement dosée, troublée et sucrée qu'il proposa à la baronne et qu'elle dégusta en gardant la première petite gorgée en bouche quelques secondes, de manière à en apprécier toutes les saveurs. Après ça, Griffont et elle ne se pressèrent pas, conscients qu'une bonne absinthe évolue, vit, se développe dans le verre et qu'elle révèle de minute en minute des richesses nouvelles. Faire durer un verre d'absinthe est un délice de fin palais.