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Citation de michelekastner


La douleur de la perte - je ne serai jamais propriétaire de rien - et cette paix qui semble m'envahir n'ont rien à voir avec le repos de la mère qui a enfin accouché : l'expérience qu'elle vit, c'est que ce qui a été une partie d'elle, qui a respiré et vécu en elle, se met soudain à respirer tout seul, à bouger de manière autonome, vit par lui-même. Le vide qui reste en elle est le début de quelque chose, un renoncement actif, tandis que moi, je vis une fin : les planches empilées, les machines arrêtées, l'atelier silencieux, j'ai continué à les voir, alors que je ne pouvais plus entrer dans l'atelier pour cause de scellés posés sur les portes destinés à m'empêcher d'emporter le matériel, comme si on pouvait emporter un chargement de planches là où je vais. Je ne pouvais pas descendre à l'atelier, je m'en fichais, je fermais les yeux et je voyais tout, pas seulement les machines, l'équipement, la pièce vitrée à laquelle on accède par un escalier mobile, les classeurs et le bureau sculpté de mon grand-père ébéniste, ou de mon père menuisier qui voulait être sculpteur, je n'ai jamais pu savoir avec certitude qui l'a sculpté, ni pourquoi c'était un secret. Je voyais chaque objet entreposé, chaque planche : j'ai une sacrée mémoire photographique qui m'a aidé à me repérer pendant toutes ces années, à tout trouver sans difficulté dans le fouillis de l'atelier, et qui maintenant m'aide à me sentir malheureux : et tout ce que je vois, ce n'est pas ce que j'ai tiré de moi pour l'offrir à la vie, mais ce que j'ai enterré.
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