Notre responsabilité sera sans concession
Une lecture pour accompagner un film. La mémoire des mots et des images. Dans son introduction, Raoul Peck rappelle « Il savait expliquer pourquoi ce n’était pas vous le problème, mais ce monde insensé, pétrifié dans ses élucubrations raciales pour cacher les laideurs plus profondes : la peur de l’autre, la pauvreté, les inégalités, la barbarie banale du quotidien ».
Le cinéaste aborde, entre autres, les relations de l’écrivain et de la France, le manuscrit d’une trentaine de pages support à ce qui allait devenir un film, « Ma tâche consistait à « trouver » ce livre non écrit. I Am Not Your Négroest le résultat improbable de cette quête », l’adaptation, « des fragments non répertoriés d’une mosaïque précieuse », les mots comme des diamants, « Un diamant qu’il fallait monter pour qu’il révèle sa valeur singulière, mettre en bonne place pour qu’il acquière la résonance voulue, et ainsi créer des niveaux de sens et de récit qui s’entrelaceraient, se contrediraient et même entreraient en collision les uns avec les autres », Haïti premier territoire libre des Amériques, le mythe de l’Amérique « unique et incomparable », la voix de James Baldwin, « Ma responsabilité consiste à faire en sorte que cette histoire vitale, celle que nous enseignent Baldwin et ses successeurs, ne soit pas enterrée ou mise sur la touche ».
Le titre de cette note est la dernière phrase de l’introduction de Raoul Peck.
Medgar Evers, Malcolm X, Martin Luther King, « Souvenez-vous de cette maison », Payer mes dettes, la haine et la pitié, la honte, Héros, la découverte des pièces de théâtre et de films, « La brutalité glaçante du film m’a à la fois effrayé et rendu plus fort », la moindre place pour soi, les lieux et les choses blanches, « vous supposez que vous aussi vous êtes blanc », Témoin, l’Etat criminel du Mississippi, des rapports du FBI, la promesse américaine, « Il y a une grande différence entre la non-résistance au mal et la résistance non violente », l’apathie morale, ce que signifie la ségrégation, « les haillons d’un homme lynché qui pendaient de l’arbre », la plongée d’un regard d’enfant sur le monde, Pureté, une imagination blanche coupable et limitée, Vendre du nègre, l’industrie du divertissement et le fantasme de la vie à l’américaine, se libérer de la terreur social et de la paranoïa, l’histoire, les grotesques plaidoyers d’innocence…
« Vous ne pouvez me lyncher
et me garder dans des ghettos
sans devenir vous-mêmes des monstres.
De plus, vous me donnez un terrible avantage.
Vous n’avez jamais eu à me regarder.
Moi, j’ai dû vous regarder.
J’en sais plus sur vous que vous sur moi.
On ne peut pas changer tout ce qu’on affronte,
mais rien ne peut changer tant qu’on ne l’affronte pas. »
Je ne suis pas un nègre, Nous sommesnotre histoire, « Mais si vous pensez que je suis un nègre, ça veut dire qu’il vous en faut un », vous devez trouver pourquoi vous avez inventé le nègre…
La force des images et la dureté pleine de tendresse des mots, une invitation à voir – et non simplement – à regarder le film.
Lien :
https://entreleslignesentrel..