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Citations et extraits (34) Voir plus Ajouter une citation
la lecture amène cela avec elle. Par définition, vous ne savez pas quels sont les mots, les phrases qui vont suivre dans le récit. Vous ne vous préparez à rien, ou plutôt vous êtes prêts à tout. Vous êtes un peu naïf, et c’est entièrement mon cas dès que j’attaque une nouvelle fiction puisque je lis sans a priori, totalement ouvert, en me laissant surprendre par tout ce qui va se déverser sur moi. Il n’y a ni passé ni futur lorsque je lis, juste le moment présent, en pleine conscience.
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Allons au cirque par exemple, afin de nous détendre un tant soit peu. Le fait d’écrire s’apparente d’ailleurs un peu à cela et les vocabulaires des deux disciplines s’épousent en quelque sorte. Il y a d’un côté le Monsieur Loyal qui personnifie la grammaire, l’orthographe, la syntaxe. Il y a le clown blanc qui incarne le vocabulaire et l’auguste qui de son côté jouera avec les expressions, les calembours, les contrepèteries. Les jongleurs, ce seront les mots et de leur dextérité dépendra la substance du livre. Les trapézistes, ce seront le phrasé et le style de l’auteur, et si, en haute voltige, il saura retomber sur ses pieds ou ses mains c’est selon, le public appréciera. Pour mater les fauves que sont les fautes de grammaire, il faudra un dompteur qui n’est autre que le discernement de l’auteur ou de son correcteur. Le funambule sur la corde raide c’est votre serviteur et je n’ai à ma disposition, en guise de filet me rattrapant en cas de chute, que vous et votre bienveillance. Le chapiteau, ce sera la maison d’édition, la piste aux étoiles ce sera la feuille blanche et les spectateurs de ces envolées circassiennes ce seront les lecteurs du livre.
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Ce qu’elle recherche avant tout dans un livre : le confort, la sensation de bien-être, même si le sujet peut se montrer grave, l’essentiel est que le livre vous prenne par la main, comme une grande personne qui guide un enfant. Si je comprends bien, l’auteur serait, d’après ses dires, un promenant. Un guide touristique. Quelqu’un en qui vous ayez confiance et qui pour une modique somme vous emmène visiter des contrées inconnues, mal connues, méconnues. Il doit non seulement vous raconter une histoire, belle de préférence, mais il doit le faire en y mettant les formes. L’anecdote narrée au détour d’une rue peut être terrible, affreuse, épouvantable, ce n’est pas grave, ce qui importe c’est la manière dont le guide va vous la déposer devant vos yeux. Le lecteur ne cherche qu’une seule chose lorsqu’il lit un livre, indépendamment de son contenu, c’est qu’on le fasse rêver.
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Il était donc de bon ton que je rencontrasse des lecteurs. Des vrais. Des beaux. Des exaltés. Des farouches. Que je les vois. Mieux, que je les sente. Que je les respire. Que je les hume. Loin des préoccupations d’un temps ancien où je m’obstinais à vendre mon livre coûte que coûte. Loin de l’obsession du premier chapitre, il fallait que je les regarde vivre ces fameux lecteurs. Comprendre la manière dont ils évoluent, percer le mystère de leur désir, écouter leur cœur battre. Ausculter leur joie et leurs attentes. Grimper sur leurs épaules massives et scruter l’horizon dégagé. S’emplir les poumons de leur bonheur. Toucher du doigt leur passion. Et avancer avec la confiance du nourrisson qu’on tient par la main.
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Avez-vous déjà aperçu un lecteur malheureux ? Il peut être déçu, il peut s’ennuyer parfois, bien entendu, mais malheureux il ne le sera jamais. Il est même foncièrement heureux celui qui lit. Le bonheur c’est cela : l’addition des joies. De toutes les joies que procure la lecture. Encore et toujours recommencées, page après page, chapitre après chapitre, ces joies vous saisissent et vous transportent. Ce désir qui vous envahit lorsque l’on tient le livre dans ses mains. Cette hâte de le commencer. De le terminer.
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Jonathan avait la main sur le cœur et faisait partie de ces bienheureux qui ne savaient pas dire non. Il fut le premier à faire partie de la CGT, la Congrégation des Gastronomes Transis dont il était en quelque sorte le rédacteur en chef. En effet, après chaque repas où la petite troupe se réunissait au grand complet, il rédigeait un article circonstancié, détaillé et extrêmement fourni sur un site dédié qui fourmillait de critiques gastronomiques en herbe, persuadés de refaire le monde ou de réinventer la roue dès lors qu’ils prenaient la plume. À la grande différence de la plupart des intervenants, Jonathan faisait un véritable reportage-photo du restaurant, de la façade extérieure jusqu’à la salle, du couvert et bien entendu de l’ensemble des plats dégustés. Il décrivait dans un très long papier l’environnement du restaurant, son emplacement, son cadre, sa décoration, l’atmosphère du lieu, l’accueil, l’agencement des tables et la vaisselle. Il notait l’élégance vestimentaire du personnel ou son absence de soin, l’adéquation entre la cuisine et la salle, la fluidité du trafic. Rien ne lui échappait, on eut dit un aigle survolant un vaste champ à la recherche d’une proie sur qui fondre. Il avait un œil des plus aiguisés et était surnommé « l’ophtalmo » par ses acolytes de par son métier bien sûr mais aussi de par sa vue des plus perçantes. Sa description des plats relevait de la chirurgie fine et on eût dit un médecin légiste disséquant avec délectation un macchabée encore frais. Il savait décrire les dressages, les monochromes, les associations de couleurs et de saveurs, les hardiesses stylistiques comme les textures les plus variées. Il plaçait un vocabulaire littéraire, des expressions d’un autre temps, des adjectifs périlleux dans de simples avis qui chez lui devenaient de petites nouvelles. Il suggérait des émotions qui procédaient de l’âme, là où d’aucuns se contentaient d’écrire « très bonne cuisine, je reviendrai ! » C’était pour lui une question de principe, il en allait de son honneur que de ne publier que des avis favorables. Lorsqu’un repas chez un restaurateur l’avait déçu, il n’écrivait jamais quoi que ce fut de négatif. Les personnes ne sachant pas dire non étaient en principe des gens extrêmement bienveillants…
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• Déguster un vin fait appel à ses cinq sens. Et peut-être même davantage. Il y a l’œil bien entendu, et puis le nez, par deux chemins différents du reste. Il y a bien évidemment le goût, mais aussi, et on n’y songe pas toujours, le toucher, en bouche, où l’on retrouve des sensations comme la température du vin, son côté irritant ou piquant quelquefois. Et puis on utilise aussi son ouïe, lorsque l’on perçoit les bulles d’un champagne ou d’un vin effervescent et surtout lorsque l’on dialogue avec autrui au sujet du vin. On écoute l’autre commenter le breuvage, on met des mots sur ses impressions, ses émotions. Pour le cerveau, c’est un processus sensoriel et cognitif complexe. Tout le plaisir et le bonheur du vin sont là !
• Un processus cognitif complexe ? Vous êtes neurologue ?
• Non, psychiatre !
(…)
• Surtout qu’au départ, la vigne s’en fiche du vigneron ! Chaque année, elle veut se reproduire, c’est tout ce qui lui importe. Les beaux raisins, tu parles, elle ne les produit pas pour les beaux yeux de la vigneronne. Ça lui est complètement égal au départ de savoir qu’elle pousse dans un sol classé grand cru ou non ! Ses racines vont chercher l’eau, la nourriture, les substrats et les oligo-éléments dont elle a besoin à des dizaines de mètres de profondeur. C’est vertigineux. Le miracle vient de là. De son exceptionnelle capacité d’adaptation aux velléités du climat. Dans sa résistance au gel, aux maladies, aux intempéries.
• Les paysages viticoles sont la démonstration la plus parfaite du génie de l’Homme. Celui-ci a épousé la nature, ses reliefs, ses courbes, ses contours, ses combes, ses trouées, ses sols et ses sous-sol et en a fait un breuvage qui dépasse notre condition.
- Et lorsque soudain un cépage se lie avec son sous-sol et devient unique, le terroir s’exprime dans toute son entièreté. Lorsque la main de l’Homme respecte cela, comme le fait Jeannot avec son vin, alors on touche au génie humain, on s’approche un peu du divin.
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Les Alpes rayonnaient, demeuraient le phare de l’Europe, son sens giratoire, sa longue-vue. De leurs sommets, on apercevait la terre, le monde, le ciel, l’univers. Ses pics, ses arêtes, ses montagnes dentelées, crochues, zigzaguant avec l’horizon formaient des pyramides d’Egypte à ciel ouvert qui n’avaient pas encore livré tous leurs secrets. Elles irradiaient, constituaient le socle commun de tous les européens mais n’en demeuraient pas moins un mystère quant à leur contenu intime. Elles étaient difficiles d’accès la plupart du temps. Comme si elles cherchaient à garder leur part d’immortalité. Les alpinistes chevronnés avaient de tout temps voulu percer leur âme, en s’agrippant à des roches, des falaises, des pics au péril de leur vie. Un certain nombre d’entre eux ne revinrent jamais, engloutis qu’ils furent au terme d’une chute interminable par une montagne et une nature qui restaient maîtresses du jeu et du temps. Les Alpes semblaient accueillantes dans leur confondante majestuosité mais elles demeuraient en réalité hostiles à tout attroupement, à toute tentative d’annexion. Le Rhône qui passait par là en constituait leur cerbère le plus zélé et les différents lacs, taches de rousseur sur une peau brunie par le soleil, représentaient les leurres, les attrapes, les camouflages destinés à rassurer les touristes. Mais à la vérité, ils n’étaient que les réservoirs, les barrages d’une colère alpine qui sévissait encore de temps à autre.
(…)
Les hommes avaient de tout temps tracé des sillons, édifié des rides, des crevasses, des cicatrices sur la peau fraîche et innocente que constituent les sols de notre planète. Comme un signe du temps, il fallait que nous autres bipèdes nous marquions à jamais notre empreinte sur notre globe terrestre qui exista bien avant nous et qui fatalement nous survivra. Pour cela, l’homme construisit des routes et il continuait à le faire. Comme une toile d’araignée dans laquelle il allait immanquablement se piéger lui-même.
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• Pierre, avec tes calembours de derrière les fagots, tu dois être le dernier rédacteur en chef de l’almanach Vermot, je ne vois pas d’autre explication à cette volonté permanente de tout porter en dérision.
• À vrai dire, il s’agit d’une forme de pudeur. De politesse. Une volonté aussi, de prendre un tout petit peu de distance par rapport aux événements. Quand mon fils s’est suicidé, je n’ai pas cessé de me faire des reproches. En long, en large et en travers, j’ai passé en revue toute ma vie. Tout ce que j’ai vécu avec lui. Son enfance, son éducation. Et je m’en suis voulu pour mille choses. Sa mort, c’était de ma faute, en avais-je conclu. Et j’ai cessé de vivre. J’étais à deux doigts de venir consulter chez toi, Sophie. Jusqu’à ce que je comprenne et que j’accepte qu’il n’y eût pas qu’un seul coupable mais probablement des dizaines. C’est Roland et lui seul qui a pris la décision de mettre fin à ses jours, et personne d’autre, pas même moi. Depuis, j’essaie, je dis bien j’essaie, de relativiser les choses, d’ironiser sur l’absurdité du monde mais aussi sur ses beautés car je crois qu’il faut prendre du recul sur toute chose, pour peu qu’on y parvienne. L’humour, bon ou mauvais par ailleurs, est une bouée de sauvetage bien souvent mais aussi et surtout une forme de désespoir. Lorsque je suffoque, que je perds la raison sous l’effet de la panique respiratoire, je me demande si en réalité je ne m’étouffe pas de rire. On peut rire de tout, absolument de tout, mais pas avec tout le monde. Vous savez, une fois que vous avez vu le cadavre de votre fils, plus rien, je dis bien, plus rien ne peut en réalité vous choquer. Et je sais qu’avec vous, qui êtes mes amis, je puis me permettre quelque impertinence qui n’est en aucun cas, je vous l’assure, une marque d’irrespect.
Je dirai non seulement que l’on peut rire de tout, j’ajouterai et j’affirmerai tout haut qu’il faut rire de tout !
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Alors, pourquoi cet abattement général, mesdames ? Parce que votre loulou n’a plus la moindre empathie à votre égard. Il ne perçoit plus ce que vous ressentez, il n’a plus cette capacité d’éprouver vos émotions, il n’a plus cette faculté de se mettre à votre place. Au tout début de votre relation, il manifestait l’empathie du médecin qui pouvait mettre un nom sur vos bleus à l’âme et vous les faire disparaître avec sa gomme magique. Il prodiguait ses soins avec la compassion de l’infirmier des sens qui allait vous administrer un vaccin qui était en définitive un enthousiasmant rappel de piqûre de la joie. Il vous rassurait comme un dentiste qui s’apprêtait à vous arracher une incisive tout en promettant qu’une autre, une dent du bonheur, allait pousser à sa place. Il savait y faire le gaillard. Parce qu’il était connecté. En direct. Sans intermédiaire. Comme s’il devinait vos peurs, vos doutes, vos interrogations. Mieux, il les pressentait. Il les précédait, le bougre. Un magicien des sens. Et cela le rendait des plus sympathiques notre empathique. Il vous laissait le verbe à neuf, comme martelé d’étincelles, de poussières d’étoile, de feu d’artifice sans fin. Fantastique à défaut d’être fantasque. Un authentique, un athlétique, un artistique, un magnétique mystique, prince de la dialectique et héraut de la sémantique. Un romantique dans la Rome antique. Un viatique à lui tout seul. Cela le rendait presque érotique. Il était votre bouclier, votre glaive, votre sève, Mesdames. Il vous débarrassait de vos tourments, vous allégeait de vos angoisses, vous délestait de vos craintes. Il agissait comme un Weight Watcher sentimental. Un bisou magique sur votre bobo affectif et hop vous étiez comme guérie d’une blessure que vous estimiez indélébile. C’était non pas le gendre idéal mais le genre d’idéal qui vous émoustillait les papilles. Le « plat signature » d’un très grand chef.
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