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Citation de Simonbothorel


Quelques citations/extraits du livre Chroniques martiennes (1950) de Ray Bradbury (Edition Denoël, 1997)

• « Lui et des milliers de ses semblables, s’ils avaient le moindre sens commun, partiraient pour Mars. Pensez donc ! Échapper aux guerres, à la censure, à l’étatisme, à la conscription, au contrôle gouvernemental de ceci et de cela, de l’art et de la science ! La Terre, vous pouviez vous la garder ! Lui, il offrait sa main droite, son cœur, sa tête pour avoir l’occasion d’aller sur Mars ! » p. 63

• « — Je crois à ce qui a été accompli, et bien des choses l’ont été sur Mars, les preuves sont là. Il y a des rues et des maisons, il y a des livres, j’imagine, de grands canaux, des horloges et des endroits pour abriter sinon des chevaux, du moins des animaux domestiques quelconques, à douze pattes si ça se trouve, qui sait ? Où que je tourne les yeux, je vois des choses qui ont servi. Qui ont été touchées et maniées pendant des siècles. « Demandez-moi donc si je crois à l’esprit des choses dans la mesure où elles ont servi, et je répondrai oui. Elles sont toutes là. Toutes les choses qui avaient une fonction. Toutes les montagnes qui avaient un nom. Et nous ne pourrons jamais nous en servir sans éprouver un sentiment de gêne. Et d’une façon ou d’une autre, les montagnes ne sonneront jamais juste à nos oreilles ; nous leur donnerons de nouveaux noms, mais les anciens noms sont là, quelque part dans le temps, et ces montagnes ont été modelées et contemplées sous ces noms-là. Les noms que nous donnerons aux canaux, aux montagnes, aux cités glisseront dessus comme l’eau sur les plumes d’un canard. Peu importe la façon dont nous y toucherons, nous ne toucherons jamais Mars. Alors ça nous mettra en rage contre cette planète, et savez-vous ce que nous ferons ? Nous la dépècerons, la dépiauterons et la transformerons à notre convenance. » (Spender à Wilder dans …Et la lune qui luit - Juin 2032) p. 95.

• « Spender emplissait les rues de son regard et de son imagination. Des gens se déplaçaient comme des lueurs vaporeuses, bleuâtres, dans les avenues pavées ; de vagues murmures se faisaient entendre ; d’étranges animaux détalaient à travers les étendues de sable gris-roux. À chaque fenêtre se penchait quelqu’un qui saluait lentement de la main, comme sous une eau intemporelle, une forme mouvante dans les abîmes d’espace au pied des tours baignées de lune. Une musique jouait sur quelque oreille interne, et Spender imaginait la forme des instruments qui pouvaient produire une telle musique. Ce pays était hanté. » (Spender lorsqu’il marche dans des vestiges d’une ville martienne dans …Et la lune qui luit - Juin 2032) p. 98-99.

• « Là, nous avons assez bien réussi. Nous avons perdu la foi et sommes allés nous demandant quel était le but de la vie. Si l’art n’était rien de plus que l’expression d’un désir frustré, si la religion n’était qu’aveuglement, quel était l’intérêt de la vie ? La foi avait toujours donné réponse à tout. Mais elle a été reléguée aux oubliettes avec Freud et Darwin. Nous étions et sommes encore des hommes perdus.
— Et ces Martiens se seraient trouvés ?
— Oui. Ils savaient marier science et religion de façon que l’une et l’autre s’épaulent, s’enrichissent mutuellement au lieu de se nier.
— L’idéal ! » (Spender à Wilder dans …Et la lune qui luit - Juin 2032) p. 112.

• « Et ce mal avait pour nom l’Isolement. Car en voyant sa ville natale rapetisser jusqu’à atteindre la grosseur du poing, puis d’un citron vert, puis d’une tête d’épingle, pour s’évanouir dans le sillage de feu, on avait l’impression de n’être jamais né, il n’y avait plus de ville, on n’était nulle part, perdu dans l’espace, sans points de repère, sans autre compagnie que des étrangers. Et quand l’Illinois, l’Iowa, le Missouri ou le Montana disparaissait dans des mers de nuages, et que, pour comble, les États-Unis se réduisaient à un îlot brumeux et toute la planète Terre à une balle de base-ball boueuse expédiée au loin, c’était là que l’on se sentait vraiment seul, errant dans les plaines de l’espace, en route pour un endroit inimaginable. » (Les pionniers - Août 2032) p. 121-122.

• « Il y avait dans l’air comme une odeur de Temps. Il sourit et retourna cette drôle d’idée dans sa tête. Il y avait là quelque chose à creuser. À quoi pouvait bien ressembler l’odeur du Temps ? À celle de la poussière, des horloges et des gens. Et si on se demandait quelle sorte de bruit faisait le Temps, ce ne pouvait qu’être celui de l’eau ruisselant dans une grotte obscure, des pleurs, de la terre tombant sur des couvercles de boîtes aux échos caverneux, de la pluie. Et en allant plus loin, quel aspect présentait temps ? Le temps était de la neige en train de tomber silencieusement dans une pièce plongée dans le noir, ou un film muet dans un cinéma d’autrefois, des milliards de visages dégringolant comme ces ballons du Nouvel An, sombrant, s’abîmant dans le néant. Tels étaient l’odeur, le bruit et l’aspect du Temps. Et ce soir – Tomás plongea une main dans le vent à l’extérieur de la camionnette –, ce soir, on pouvait presque toucher le Temps. » (Tomás avant de rencontrer le Martien venant d’un autre espace-temps dans Rencontre nocturne - Août 2033) p. 134.

• « Seigneur Dieu, quel rêve », soupira Tomás, les mains sur le volant, songeant aux fusées, aux femmes, au bon whisky artisanal, aux danses de Virginie, à la fête. Quelle étrange vision, se disait le Martien lancé à toute vitesse, songeant au festival, aux canaux, aux bateaux, aux femmes aux yeux d’or, aux chansons. La nuit était sombre. Les lunes s’étaient couchées. Les étoiles scintillaient sur la route vide où il n’y avait plus un bruit, plus de voiture, plus personne, plus rien. Et qui demeura ainsi, dans le noir et la froidure, tout le reste de la nuit. » (Rencontre nocturne - Août 2032) p. 142.

• « Et là-haut, là-haut, toujours plus haut dans les constellations de la douce nuit d’été, les Ballons de Feu dérivaient, tandis que des yeux bleu-blanc-rouge les suivaient, sans un mot, des terrasses familiales. Là-bas, au fin fond de l’Illinois, au-dessus des rivières enténébrées et des demeures endormies, les Ballons de Feu rapetissaient avant de disparaître à jamais... Père Peregrine sentit ses yeux s’embuer de larmes. Au-dessus de lui planaient les Martiens, non pas un mais, semblait-il, un millier de Ballons de Feu chuchotants. D’un instant à l’autre, il allait trouver son cher grand-père depuis longtemps disparu à ses côtés, les yeux levés vers la Beauté. » (Père Peregrine lorsqu’il voit pour la première fois les Martiens en forme de sphère dans Les ballons de feu - Novembre 2033) p. 154.

• « Ils descendirent des collines en file indienne au coucher du soleil. Père Peregrine jeta un coup d’œil en arrière et vit les feux bleus. Non, songea-t-il, nous ne pouvions pas bâtir une église pour des êtres tels que vous. Vous êtes la Beauté même. Quelle église pourrait rivaliser avec les feux d’artifice de l’âme dans toute sa pureté ? » (Les ballons de feu - Novembre 2033) p. 168.

• « J’ai l’impression d’être morte, songea Janice, d’être au cimetière par une nuit de printemps : tout est en vie sauf moi, tout le monde bouge et s’apprête à ce que la vie continue sans moi. C’est ce que je ressentais chaque printemps, quand j’étais toute jeune : je passais devant le cimetière et je pleurais sur tous ceux qui étaient là parce qu’ils étaient morts et que ça me semblait injuste, par des soirs aussi doux que celui-ci, d’être vivante. Je me sentais coupable d’être en vie. Et là, ce soir, j’ai l’impression qu’on m’a retirée du cimetière pour me laisser survoler la ville une dernière fois et voir ce que c’est d’être vivant, d’être une ville avec des gens dedans, avant qu’on ne rabatte le noir couvercle sur moi. » (Janice lorsqu’elle part de la Terre dans un vaisseau dans Les grands espaces - Mai 2034) p. 182

• « Je crois qu’ils ont tous deviné, mais ils n’ont pas posé de questions. On ne questionne pas la Providence. Si on ne peut pas avoir la réalité, autant se réfugier dans le rêve. » (Le martien a Lafarge lorsque ce dernier tente de retrouver ce dernier qui prenait la forme de son fils décédé dans Le Martien - Septembre 2036) p. 242.

• « — C’est comme quand j’étais gosse. On entendait parler de guerres en Asie. Mais on n’arrivait pas à y croire. C’était trop loin. Et il y avait trop de monde qui mourait. C’était impossible. Même en voyant les reportages filmés, on n’y croyait pas. Eh bien, aujourd’hui c’est la même chose. La Terre est notre Asie. Tellement loin qu’on n’arrive pas à y croire. Elle n’existe pas. On ne peut pas la toucher. On ne peut même pas la voir. Tout ce qu’on voit, c’est une lumière verte. Deux milliards de personnes vivraient sur cette lumière ? Incroyable ! La guerre ? On n’entend même pas les explosions ! » (Peregrine au marchand de bagage dans Le marchand de bagages -Novembre 2036) p. 248.

• « Au coucher du soleil, après une éprouvante journée de route, il s’arrêta sur le bas-côté, se débarrassa de ses chaussures trop serrées, se laissa aller dans son siège et rabattit son feutre gris sur ses yeux fatigués. Sa respiration se fit lente et régulière. Le vent soufflait et les étoiles brillaient tendrement au-dessus de lui dans le crépuscule. Les montagnes martiennes s’étendaient alentour, vieilles de millions d’années. La clarté des étoiles se reflétait sur les tours d’une petite ville martienne, pas plus grande qu’un jeu d’échecs, nichée dans les collines bleues. Il gisait dans cet état incertain entre la veille et le sommeil. » (Walter après avoir fait la route pour trouver Genevieve Les villes muettes - Décembre 2036) p. 276-277.
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