D'aussi loin que je m'en souvienne, jamais une autobiographie – genre intimiste par excellence et donc puissant vecteur d'émotions, bonnes ou mauvaises – ne m'a laissée indifférente. J'adresse donc toutes mes félicitations à Reidar Jönsson qui, avec Ma vie de chien, remporte le tout premier prix de ma carrière de blogolectrice : celui de l'équanimité !
Détrompez-vous toutefois (et rangez-moi ce champagne, crénom de nom !), ce qui peut sonner comme une victoire n'en est en réalité pas une : à mes yeux en effet, il n'est pire infortune pour un livre que de ne générer aucune émotion chez son lecteur. Mieux vaut être médiocre, susciter en moi la colère ou l'indignation, comme a pu le faire Elle s'appelait Sarah, qu'être de qualité mais se faire l'écho d'un néant émotionnel, à l'image de Ma vie de chien.
Bien que la vie de l'auteur (Ingemar Johansson dans le livre) soit éminemment tragique et donc qu'elle appelle à une certaine compassion, je n'ai pas réussi à m'attacher ne serait-ce qu'une seconde à lui, encore moins à ses proches, et donc à prendre part à ses (nombreuses) bévues. De ces trois cents pages ne résulte finalement qu'un profond malaise teinté de culpabilité : comment ai-je pu, moi que pourtant un rien bouleverse (même Helga Pataki dans Hé Arnold, oui, Helga !), rester insensible à l'histoire de ce gamin ? Et pourquoi ?
Sans doute, dans un premier temps, parce que Ma vie de chien est une autobiographie non linéaire qui s'appuie sur une quantité mirobolante de flash-back ce qui rend le récit assez confus. Au lieu de se laisser tranquillement porter par cette histoire, l'esprit cherche désespérément à comprendre ce qu'il lit (ce qui, vous en conviendrez, devrait s'opérer naturellement) et finit par s’essouffler. Forcé de se contenter des informations essentielles (un père absent et irresponsable, une mère alitée qui préfère lire plutôt que s'occuper de ses enfants) l'émotion ne peut le cueillir.
L'autobiographie se découpe en plusieurs chapitres centrés soit sur l'année 1958, essentiellement marquée par la présence fantomatique de sa mère et de nombreux coups durs, soit sur l'année 1959, elle plus positive puisqu'il vit alors chez son oncle Gunnar et multiplie les rencontres : Monsieur Holdst à qui il lit les journaux en échange de cours de flûte, Saga, une jeune adolescente qui pratique le football et la boxe et rejette sa féminité ou encore Göte, le meilleur ami de son oncle. Ma vie de chien a donc pour fil rouge la mémoire qui, seule, sélectionne des bribes passées ou présentes de sa vie.
Le style parfois extrêmement pertinent et poétique ("J'ai souffert d'une carence de réalité appliquée. Je sais si mal la manier que je n'ai cessé de la considérer comme un jeu") mais majoritairement oral peut également expliquer ma non adhésion à ce livre. Le lecteur se retrouve en effet acculé dans la tête d'Ingemar Johansson qui passe sans cesse du coq à l'âne ce qui s'avère extrêmement fatiguant. C'est d'autant plus handicapant que cela s'accompagne d'une dispersion aléatoire des informations qui, elle, ne facilite pas la compréhension.
Ma vie de chien retrace donc de manière confuse mais parfois sensiblement poétique les mésaventures d'un enfant paradoxalement plein de vie et d'optimisme, au monde intérieur riche que la vie a peu à peu transformé en animal indomptable.
Et pour ceux que Ma vie de chien intéresse, sachez que ce livre est le premier volet d'une trilogie autobiographique : il a été suivi d'Un chien enterré et du Paradis du chien.
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