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La Grand-Rue prend véritablement sa grandeur les soirs d'hiver où ses défauts devenant qualités, elle accueille avec panache la jeunesse beaucairoise en mal de promenade publique. Ses cinq à sept sont devenus célèbres.
La hauteur des immeubles au cheminement tortu protège des colères des vents.
L'éclairage des vitrines farouchement maintenu par l'espoir d'une vente tardive, accable d'un blanc mépris les rares réverbères publics humiliés.
Exceptionnels sont les passages de véhicules.
Ont cependant droit d'accès privilégié, le triporteur à pédales de l'exotique ''planteur de Kaïffa'' spécialisé dans la vente, de porte à porte, de rutilants paquets de café puissamment aromatisé et la camion tonitruant de l'astucieux Rieter, précurseur des succursales multiples.
Ce monstre de ferraille, reliquat de la Grande Guerre, monté sur roues aux bandages pleins transporte en ses flancs brinque ballants des cargaisons hétérogènes où voisinent avec un indolent mépris de l’orthodoxie épicière, les morues salées et les barils de pétrole, l'huile d'arachide et les sacs de sucre en poudre.
Emprunte également cette voie sacrée, l'autobus Nîmes-Beaucaire, descendant direct des antiques diligences, qu'un pionnier sans complexe a réalisé en faisant adapter par un menuisier local, une vaste carrosserie de bois, sur le châssis d'un camion Ford.
Aucun accident n'ayant terni l'image de marque de cet engin, l'entreprise est devenue prospère sous le sigle ''les cars Souques''.
C'est vers cette ambiance de mouvement et de chaleur que les méditatives et caritatives contemplatrices des cierges fumant en spirales, se dirigent, après avoir franchi le perron de Notre Dame surplombant de l'élégance curviligne de ses marches, ce lieu de perdition.
Les yeux baissés sur l'attristante turpitude d'une jeunesse ''déchristianisée'' qui n'atteindra jamais comme elles, les délices d'un ''nirvana'' ineffable, elles se dispersent pieusement dans les rues adjacentes vers la quiétude suave de leurs douillets appartements.
Par groupes plus ou moins étoffés, deux files anarchiques et explosives de jeune gaieté, se croisant à peu près régulièrement aux mêmes endroits, parcourent inlassablement l’itinéraire témoin de la sentimentale éclosion de leurs rêves juvéniles. Des billets froissés, à l'encre tremblotante sont glissés au passage dans des mains d'inquiétude et enfouis instantanément dans l'encolure complice des 'pull-overs' discrets.
De petits cris d'animaux domestiques ou des sifflements d'étranges reptiles tropicaux ponctuent la double navette contradictoire qui explose en rires pleins de fraîcheur.
Des gamins pourvus de lampes électriques poursuivent des fillettes aux longues tresses.
Quelques mères de famille se hasardent parfois à rompre cet enchantement d'avant métamorphose, soit pour compléter un repas du soir un peu négligé, soit par pulsion jalouse et inavouée de ne pas avoir eu le temps de voir passer leur propre jeunesse.
Les rues traversières accueillent alors de leur ombre protectrice cet innocent gibier qui va se jeter tête baissée sur des silhouettes doubles, écrasées dans le renfoncement des portes cochères.
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Le chauffage collectif étant ignoré, chaque classe était dotée d'un poêle en fonte sur lequel frissonnait et chantait en permanence une casserole d'eau.
Chaque élève à tour de rôle arrivait à l'école avant ses camarades et après avoir dégrillé le poêle, l'alimentait et l'enflammait
Lorsque le soir entraînait la pénombre, le maître allumait quelques becs papillon nourris au gaz de houille, dispensant une flamme vert bleutée, frangée de jaune d'or, sautillante sous un immense abat jour en tôle peinte en vert foncé à l'extérieur, en blanc jaunâtre à l'intérieur.
Soucieux de son rôle éminant, César se rendait sur le champ à la réserve de charbon. L'époque s'inscrivant dans un souci forcené de l'économie domestique, César en ramenait un 'pâté' c'est-à-dire de la poussière de charbon malaxée avec de l'eau. Ce pâté était disposé dans le poêle après que son centre eût été soigneusement perforé pour faciliter le passage de l'air.
Ainsi se prolongeait une chaleur sans flamme, molle, souvent responsable de maux de tête heureusement fugaces.
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Marie Mante, pour ne pas la nommer, tient en effet le quatrième rang dans la hiérarchie ecclésiastique locale après le curé, le sacristain, l'enfant de chœur.
Elle est chaisière de son état, donc responsable de la tenue de ce précieux mobilier qu'elle caresse voluptueusement de la soie bariolée de son plumeau de volatiles défunts. Intraitable, sur le parfait alignement de ces ''repose cul'', elle est en butte naturellement aux persécutions des gamins en veine de communion solennelle, partisans des lignes brisées ou des ondoiements mélangeurs.
Régisseur de recettes féroce, elle est chargée d'encaisser deux sous par chaise louée.
Or si elle n'a aucun souci avec les bigotes professionnelles, propriétaires de leur ''chaise-prie Dieu'' dont le titre est attesté par une plaque de cuivre vissée dans le bois et portant l'identité de notables prestigieux, il n'en est pas de même avec les occupants précaires des chaises populaires qui utilisent des procédés démoniaques pour échapper à sa vigilance.
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