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Citation de Charybde2


Elle plaça sa main libre sur son autre hanche et dit, « Écoute, mon gars, tu me connais ni d’Ève ni d’Adam. C’est la première fois que je me retrouve coincée à ce poste, tu vois ? Mais ici tout le monde te connaît, toi.
– Mais bien sûr, c’est ça », dit-il. Il ouvrit les mains en un large mouvement. « Tout le monde connaît Artie. » Il se recula et se balança sur les pieds de sa chaise. « Tu m’as tapé dans l’œil une fois quand j’étais là. T’es la fille qu’on peut pas oublier. Même quand on t’a jamais rencontrée.
– Ouais, dit-elle, et toi t’es le connard qui vient tous les mardis, qui tête sa bière pendant trois heures et qui laisse pas un rond. Tu restes planté là avec ta langue qui frotte le sol. Ici c’est un bar, bon Dieu, pas un hôtel. Y en a qui doivent bosser pour vivre. » Elle jeta un œil aux autres clients et commença à s’éloigner, glissant entre la table d’Artie et celle d’à côté. Les tables étaient tellement proches qu’elle devait se faufiler en travers.
Il tendit le bras pour la retenir mais s’arrêta quand elle rejeta la tête en arrière et lui dévoila ses dents serrées. Il pointa un doigt comme un flingue, dirigé pile entre ses yeux. Mais sa main tremblait et il dut mouiller ses lèvres et déglutir avant de pouvoir parler. « Tu vas avoir des ennuis, ma jolie. Je suis un ami du patron.
– Arrête ton char », répliqua-t-elle. Sans se retourner, elle lança, « T’es l’ami de personne. »
Il abattit sa main droite sur la table et reprit sa position face à la fosse en contrebas où les filles combattaient. Un homme épais, barbu, vêtu d’une salopette, d’une veste en cuir et d’une chemise de travail avec le nom Randy sur la poche, tractait dans la fosse un bidon crade et gras de deux cents litres. Il avait les manches retroussées et des dragons assortis tatoués sur les avant-bras. Il renversa le bidon qui répartit une gelée rouge et tremblotante. La Jell-O scintillait sous les projecteurs, points blancs intermittents comme des battements de cœur.
Les doigts d’Artie tambourinaient sur la table. Il aimerait bien voir la serveuse dans cette fosse, pensait-il. Il avait envie d’attaquer sa bière, mais il savait que s’il prenait cette première gorgée ensuite ce serait cul sec, et on ne se laisserait pas rester là avec un verre vide. C’était ce genre de rade. Il ne pouvait pas envisager de boire à des tarifs pareils, alors qu’il avait de quoi s’acheter un pack de six pour le prix de deux bières ici. Alors il resta assis, à regarder ses pouces, attendant que quelque chose se passe. Il songea à faire un saut chez sa mère. L’occasion d’un repas à l’œil. Il soupesait cette idée lorsqu’un vacarme soudain se fit entendre à l’entrée. Les gens tapaient des pieds et commençaient à parler plus fort. Ça donna un coup de fouet à Artie. Il siffla la mélodie de When the Saints Come Marching In et jeta par-dessus son épaule droite un regard vers la porte.
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