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Citation de mimo26


Le cardinal Lomeli quitta son appartement du palais du Saint-Office peu avant 2 heures du matin et traversa d’un pas rapide les cloîtres sombres du Vatican vers les appartements du pape.

Il priait : Ô Seigneur, il lui reste tant à faire alors que mon utilité à Ton service est terminée. Il est aimé alors que je suis dans l’oubli. Épargne-le, Seigneur. Épargne-le, Prends-moi plutôt que lui.

Il remonta péniblement la côte pavée vers la place Sainte-Marthe. Il faisait encore doux et brumeux à Rome et pourtant le cardinal y détectait déjà la première fraîcheur de l’automne. Il bruinait. Le préfet de la Maison pontificale avait semblé dans un tel état de panique, au téléphone, que Lomeli s’attendait à trouver une scène de totale confusion. En réalité, la place était particulièrement déserte, à l’exception d’une ambulance solitaire garée à distante discrète, qui se découpait contre le flanc méridional illuminé de Saint-Pierre. Le plafonnier était allumé, les essuie-glaces balayaient le pare-brise, et le cardinal parvint à distinguer le visage du chauffeur et d’un brancardier. Le chauffeur parlait dans un téléphone portable, et l’évidence s’imposa soudain à Lomeli : ils ne sont pas venus conduire un malade à l’hôpital, ils sont venus chercher un corps.
À l’entrée vitrée de la résidence Sainte-Marthe, le garde suisse le salua, portant un gant blanc au plumet rouge de son casque.

— Éminence.

— Voudriez-vous vous assurer que cet homme n’appelle pas les médias ? répliqua Lomeli avec un signe de tête vers l’ambulance.

Il régnait dans la résidence une atmosphère austère et aseptisée, rappelant celle d’une clinique privée. Dans le hall de marbre blanc, une dizaine de prêtres, dont trois en robe de chambre, attendaient, visiblement ahuris, comme s’ils venaient d’être réveillés par une alarme d’incendie et ne savaient quelle conduite adopter. Lomeli hésita sur le seuil, sentit quelque chose dans sa main gauche et s’aperçut qu’il serrait sa calotte rouge. Il ne se rappelait pas l’avoir prise. Il la déplia et la posa sur son crâne. Il avait les cheveux mouillés. Un évêque, un Africain, voulut l’arrêter pendant qu’il avançait vers l’ascenseur, mais Lomeli se contenta d’un salut de la tête et poursuivit son chemin.

La cabine mit une éternité à descendre. Il aurait dû prendre l’escalier, mais il était trop essoufflé. Il sentait le regard des autres dans son dos. Il devait dire quelque chose. L’ascenseur arriva et les portes s’ouvrirent. Lomeli se retourna et leva la main en signe de bénédiction.

— Priez, dit-il.

Il pressa le bouton du second étage ; les portes se refermèrent et il entama son ascension.

Si Ta volonté est de l’appeler à Toi et de me laisser ici-bas, accorde-moi la force d’être un rocher pour les autres.
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