Vous étiez amoureux fou de Mathilde de la Causse et elle s’est toujours refusée à vous. Vous ne supportiez pas de la voir avec un homme à ses côtés. Vous avez développé une jalousie monstrueuse et meurtrière. Vous avez pris le risque insensé de la supprimer en même temps que son mari. Alors, lorsqu’elle vous demandait d’éloigner ses amants successifs, il n’y avait pour vous qu’une solution : les supprimer ! Mais vous étiez trop lâche pour le faire vous-mêmes. L’appât du gain de Marc Debrot a parfaitement fait l’affaire.
Vous devez être d’une discrétion à toute épreuve. Les sujets que nous avons à traiter sont la plupart du temps ultraconfidentiels. Vous serez souvent confrontée à des images très violentes, accompagnées de texte relatant des homicides qui parfois dépassent l’imagination. Vous serez en quelque sorte la mémoire de chaque enquête et ce côté est bien souvent passionnant. J’aime mon métier de flic, mais il peut y avoir des moments très durs, la nature humaine peut révéler des côtés effrayants.
Une seule carte ne peut pas signifier grand-chose. En général, dans le tarot divinatoire, on fait tirer cinq cartes choisies dans les vingt-deux arcanes majeurs et de là on extrait un message ou une divination. Tu m’as dit que les victimes étaient au nombre de cinq. On peut donc émettre l’hypothèse que chaque victime avait une carte en sa possession ? et de surcroît, le message délivré devrait donner la clé de leurs morts !
Ensuite, j’ai la liste de tous les hommes qui ont partagé un temps la vie de la veuve de la Causse. Tous sont morts de manière violente, et là aussi rien ne semble anormal. C’est quand même curieux cette succession de décès. Autre élément, toutes ces personnes, cinq au total, sont des cadres ou des dirigeants d’entreprises proches de l’industrie du textile.
C’est une personne d’une culture immense, un véritable puits de science. Il a souvent été le déclencheur qui m’a permis de résoudre des énigmes que je pensais insolubles. Il est pour moi un ami extrêmement précieux. D’ailleurs, je vais aller le trouver à propos de cette découverte, j’ai besoin d’en savoir plus. Cela cache certainement quelque chose.
J’avais juste demandé à Berdoz d’éloigner mes amants lorsque je me lassais d’eux. Cela ne signifie pas les éliminer. Je comprends maintenant pourquoi Debrot est venu me menacer il y a quelques temps, en prétextant que je parlais trop. Berdoz avait-il le projet de me faire supprimer ? Je pense que grâce à vous, il n’en a pas eu le temps.
On aurait donc aussi affaire à un crime prémédité. Tous ces homicides et ces cinq cartes du Tarot nous ramènent à la Baronne Mathilde de la Causse. Serait-elle la cause de ces assassinats ? Serait-elle l’instigatrice de ces homicides ? Quel en est le mobile ? Je vais retourner voir cette « veuve noire » avec les cartes du tarot. Auparavant, je vais demander à Roland Jaquin de passer me voir.
Elle ne s’est jamais complu dans la douleur. C’est une femme au caractère bien trempé, douée d’un charisme et d’un charme redoutable.
Depuis le début de son veuvage, elle a eu pas moins de cinq amants successifs, en général plus jeunes qu’elle.
Côté sensation et plaisir, elle n’avait rien perdu, puisque seules ses jambes fracassées depuis le genou ne ressentent plus rien.
Il y a Illona bien sûr, son colibrí d’amour, toujours prête à lui remonter le moral quand c’est nécessaire. Avec toute la douceur et tous les gestes tendres qui emplissent son être.
En ce moment, elle est là, lovée contre son homme. Le feu crépite dans la cheminée, au dehors la nuit tombe, lentement. Dans la grande pièce, ce n’est plus qu’un jeu d’ombres et de lumières.
Nous avons, sur chaque scène de crime, retrouvé une carte, soit dans l’ordre :
« La Justice » pour Delvaux, moto sabotée.
— « Le Diable » pour Cerdan, explosion due au gaz, tuyau cisaillé.
— « La Mort » pour Caillot, empoisonnement.
— « Le Pendu » pour Meystre, idem.
— « Le jugement » pour Corthésy, écrasé volontairement.