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Citation de Sflagg


[...]
- Mais qui voudra de votre pays, Simpson ? Les indiens ? Ils regrettent la venue des blancs et rêvent du temps où ils étaient seuls. Les Français auraient préféré que les Anglais ne viennent pas. Les Anglais méprisent les Indiens et les Français, et ressentent les immigrants comme souillure. Toutes ces races se détestent solennellement et voudraient être seules au pays. Alors, dites-moi, Simpson, qui sont vos compatriotes ?
- Les gens de bonne volonté, répondit Simpson sans l'ombre d'un sourire. Ceux qui voudront bien m'accepter comme un des leurs.
Askik éclata de rire.
- C'est ta définition d'un Canadien ? Un homme de bonne volonté ?
- Quel autre lien y a-t-il entre vous et moi, à part cette terre ?
- De quel droit vous arrogez-vous cette terre ? La tenez-vous des indiens ?
- De qui les indiens la tiennent-ils ? Ne m'avez-vous pas dit que les Cri et Sauteaux ont chassé d'autres tribus qui se trouvaient ici avant eux ? Et je ne dis rien des Métis...
- Mes ancêtres indiens occupent cette terre depuis des milliers d'années !
- Et vous depuis vingt-cinq ans à peine. Comme moi. Je n'ai pas choisi de naître anglais, ni vous métis. Avez-vous plus de droit à faire valoir sur cette planète que moi ?
- Comment se fait-il que j'en aie moins ?
- Ah ! voilà le mal. Il est présent. Actuel. Pas historique. Nous sommes deux êtres humains qui avons droit aux mêmes égards. Voilà notre droit ancestral. il est le même pour tous.
- Excusez-moi, Simpson. Mais quand un gaillard entre de force dans votre maison en disant : " La terre n'appartient à personne, j'ai autant droit à cette maison que toi ", lui faites-vous une place ? Quand bien même vos descendants vivraient ici mille ans, ils seront toujours des intrus, du point de vue indien.
- Alors peut-être devons-nous demander refuge aux indiens.
- Ce n'est pas la peine. Voilà la requête qui part...
Askik fit un coup de tête vers la rivière où les soldats chargeraient les canons et mitrailleuses dans le vapeur.
- Voilà comment les poilus demandent l'hospitalité.
- Je sais que tout plaide contre moi, Mercredi, dit Simpson d'un air triste. Mais je suis persuadé qu'un jour nous aurons tous les mêmes ancêtres, nous aurons tous du sang français, métis, anglais et indien. On ne pourra attaquer personne sans frapper une partie de soi-même.
- Nous formerons un seul peuple canadien ?
- Il n'y aura plus de peuples.
- Vous avez raison. Il faudra bien cent ans pour qu'on voie les choses de votre façon.
- J’espère que non, dit Simpson. J'aimerais vivre un peu dans un pays tolérant. Rien que pour voir...
- Vous entendez les soldats jurer lorsque nous parlons français ? Croyez-vous qu'ils changeront d'attitude de leur vivant ?
- C'est de l'ignorance. L'ignorance se répare.
- C'est de la haine, corrigea Askik. La haine meurt avec son homme.
- Alors, d'après vous il n'y a pas d'espoir ?
- Pas pour les corneilles.
- Je ne peux pas vivre ainsi.
- Parce que vous avez mauvaise conscience, fit Askik. Si vous vous trouviez du côté des opprimés, vous finiriez par accepter.
- Comment pouvez-vous prendre ces chose à la légère ?
- Force d'habitude. Regardez, ils arriment le bateau au quai. Trop de vent. Nous allons dormir avec nos canons.
- J'espère qu'on se fera massacrer...
- Réflexe d’oppresseur, Simpson. Et d'ailleurs, ce serait trop juste.
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