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Critiques de Ronaldo Correia de Brito (4)
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Le jour où Otacilio Mendes vit le soleil

Lu dans le cadre de Masse critique.



Voici un recueil de 11 nouvelles, qui nous vient du Nordeste brésilien, région au climat hostile, fait de chaleur, de poussière et de sécheresse. Région caractérisée aussi par des traditions archaïques, où les femmes sont soumises aux hommes, père, mari ou frères.

Les points communs entre ces courtes histoires ? l’honneur, les trahisons, la vengeance, les amours contrariées, la passion, la violence des sentiments. Ce qui saute aux yeux, ensuite, c’est l’enfermement des personnages, pris au piège d’une fatalité inexorable, qui savent que tout est écrit depuis les siècles des siècles, et que, amen, ils ne pourront rien y changer. Certains tentent de résister, mais au final, tous attendent une disparition, une mort. La leur, ou celle de celui qui les enferme, pour être enfin libérés. Ce qui frappe, enfin, c’est que toute cette fureur surgit de l’intérieur de la famille, entre parents et enfants, mari et femme, frères et sœurs.

Le style est sobre et fluide, mais pas toujours aisé, parce qu’allusif, elliptique. Je me suis parfois égarée à comprendre « qui dit quoi à qui et quand », au point de devoir revenir quelques pages en arrière. Selon moi, trois nouvelles sortent du lot : Tourbillon, Dieu spécule, et Mensonge d’amour.

J’ai pensé à Garcia Marquez pour le réalisme magique, à Caïn et Abel, à Garcia Lorca pour le sang et la violence. Il y a aussi cette impression d’avoir déjà entendu quelque part des histoires semblables. Sans doute parce que l’auteur, en partant à la recherche des secrets et des peurs les plus intimes et les plus anciens des hommes dans cet univers si particulier du sertao, nous raconte en fait des histoires universelles.

Merci à Masse Critique de Babelio et aux Editions Chandeigne pour cette belle découverte (en particulier à Mme A. T. pour le petit mot et le catalogue).

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Le jour où Otacilio Mendes vit le soleil

Ronaldo Correia de Brito est né en 1950 dans le Nordeste brésilien. Dramaturge reconnu, il tient une chronique dans la plus importante revue culturelle de la région, Continente, et est l’auteur de plusieurs recueils de nouvelles et romans, comme Le Don du mensonge, Prix São Paulo du meilleur roman 2009. Il réside actuellement à Recife, où il exerce la médecine.

Son recueil de nouvelles Faca, traduit chez nous sous le titre Le Jour où Otacilio Mendes vit le soleil, a reçu un accueil très élogieux de l’ensemble de la presse brésilienne. C’est l’éditeur qui m’a contacté et adressé gracieusement un extrait de quatre nouvelles tirées de cet ouvrage qui en comporte onze. Mon avis ne porte donc que sur ces fragments. J’imagine que cette mise en bouche représente au mieux l’écrivain et/ou que ces nouvelles sont parmi les meilleures du recueil.

Dans L’Attente de l’escadron, le Vieux dont on ne connaît pas le passé précisément, vit seul dans une maison dont portes et fenêtres sont grandes ouvertes, il y soigne et recueille sans poser de question, même ce Chagas, un criminel notoire poursuivi par un escadron de l’armée qui approche. Avec Tourbillon, il s’agit d’une famille qui a perdu son faste, le fils préféré est décédé et l’épouse de l’autre s’est enfuie, pendant ce temps la mère joue du piano sur un instrument délabré. Le texte qui donne son titre au recueil, Le Jour où Otacilio Mendes vit le soleil, nous fait croiser le destin d’Otacilio, marié et père de douze enfants, retranché dans une pièce et menaçant perpétuellement de se donner la mort. Chacun en vient presque à espérer qu’il mette sa menace à exécution plutôt que de rester dans l’attente. Enfin dernier extrait, Le Choix, Aldemora depuis qu’elle a été abandonnée il y a dix-huit ans par Luis, son premier mari brutal, s’est remariée avec le doux Livino. Jusqu’au retour de Luis. Sans conteste possible, c’est cette dernière nouvelle qui m’a le plus emballé.

Derrière une écriture plutôt légère et simple à première vue, se dissimulent des histoires sombres où la mort, passée ou à venir, n’est jamais loin. La construction des nouvelles, faite d’ellipses ou de non-dits crée un climat vaguement mystérieux, intrigant en tout cas, pas toujours compréhensible immédiatement ce qui oblige parfois le lecteur à relire une page antérieure pour en suivre la narration. Là ou d’autres auraient forcé le trait dans le pathos ou le dramatique, l’écrivain brésilien œuvre dans la retenue, soit il nous laisse imaginer soit il n’insiste pas quand sa plume révèle. Enfin, sur ces quatre textes tout du moins, on sent poindre un amour de l’auteur, une indulgence fraternelle, pour ces/ses personnages qui j’imagine, doivent représenter pour lui, un certain Brésil.

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Le don du mensonge

Un grand-père meurt dans le Sertao nordestin. Trois cousins. Confrontations, histoires tues ou affabulées, relations niées, rancœurs au passé et au présent. Une suite de générations dans le temps et l’espace. L’auteur déploie une toile irisée pour nous parler d’Adonias, de David, d’Ismaël, de Nathan, d’Elias et des autres.



Ici au Brésil mais aussi hier, ailleurs, entre les siècles et les lieux. C’est l’histoire de migrants, de conversions, des refus, des voyages et des mensonges. Qu’importe alors que l’on soit indien, juif, portugais, esclave africain. L’horizon passé est celui du métissage, mais aussi des rapports violents, des trahisons et du machisme.



C’est aussi une sorte de quête « Pourquoi suis-je venu à la Galiléia ? Et je me répète la question à chaque pas . Pourquoi suis-je venu ? Pourquoi retournons-nous sur les lieux d’où l’on nous expulse comme des fausses couches ? »



Un homme meurt, aimé, respecté et haï. Les mots tournent, vacillent, dressant des tableaux tantôt réalistes tantôt emprunts de folie et de divagations.



Les hommes dominent, mais la présence forte de femmes (Donama, Teresa, Raquel, Maria, Julia) rejaillit, en creux, en souffrance et en dépendance ou en rébellion.



Des mots âpres comme le paysage deviné derrière ces êtres, qui sont un peu nous-même.
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Le jour où Otacilio Mendes vit le soleil

Le réalisme magique est un genre étonnant qui porte la trace des civilisations passées, un primitivisme puissant, une force d’évocation troublante. Les amateurs de Gabriel Garcia Marques ne seront pas déçus puisque, dans les régions reculées du Brésil, la violence des traditions écartèlent hommes et destins. Vendettas, fantômes du passé, femmes brisées, nous ne sommes pas loin de la Chronique d’une mort annoncée. La mort hante les pages, elle y rôde avec son caractère obligatoire, elle devient la solution, le seul moyen de trouver un apaisement, comme une rafale sous un soleil de plomb. Tous les personnages répondent à son appel. Pire, certains l’invitent dans un hamac sur leur seuil (Inacia Leandro) ou vont jusqu’à l’incarner (Lua Cambara) sur des terres vaporeuses qui relient le monde tangible à l’au-delà. Mais le spectre n’est jamais un danger, il reste la simple manifestation d’une existence douloureuse et troublée.



Dès la première nouvelle, le ton est donné. Un homme trop généreux a fait l’erreur d’héberger un bandit de grand chemin. Sa condamnation est sans appel, les forces de l’ordre viendront le tuer. Mais les figures les plus présentes et les plus tragiques du recueil sont principalement celles des femmes, prisonnières de leurs conditions, victimes des violences conjugales et de règlement de compte dans une culture où les hommes défendent leur honneur à coup de couteaux. Le choix compte parmi les textes qui m’ont le plus marqués. Entre un homme brutal, qui a manqué de la tuer, et un mari très tendre Aldenora Novais est partagée entre le cœur et la raison. Chaque personnage a d’ailleurs pour trait cette passion très « latine », un côté entier, sauvage, sanguin et, finalement, assez morbide.



L’espace temps est assez flou. Présent et passé se rencontre, il semble difficile de situer véritablement l’époque dans laquelle se déroulent les scènes. Cette impression est favorisée par une écriture très poétique et pudique. Correia de Brito – et c’est là un petit défaut – devient parfois confus. Alors les pistes se brouillent, il faut faire le geste assez désagréable de revenir en arrière pour retrouver le fil d’une histoire, de sorte que son recueil s’adressera avant tout aux lecteurs déjà initiés à ce type de littérature. Néanmoins, la douceur des mots, la distance du ton permet une mise en relief très dure de la violence qui pèse sur tout l’ouvrage. Quelque chose de très froid traverse les paysages désertiques du sud pour venir déranger notre inconscient. Que l’on se sente touché ou non, on ne peut en sortir tout à fait intact, et les fins laissées en suspend, dans la suggestion de ce qui arrivera, y contribuent beaucoup. Comme la mort ne semble pas définitive dans cette région, les histoires se doivent de garder elles-mêmes un aspect étrangement inachevé.



Je remercie les éditions Chandeigne pour cette découverte.
Lien : http://unityeiden.fr.nf/le-j..
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