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Au moment où Andreas laisse revenir le volant dans l’axe, après ce sale virage, la chose est déjà là, tapie quelque part. Mais il ne la perçoit pas. Ça plane au-dessus de lui sans un bruit, sans un signe impalpable. La faute peut-être aux champs de colza qui défilent en longues bandes jaunes floutées sur le bas-côté, et leur parfum entêtant, et Laure qui fredonne en regardant le paysage par la vitre baissée. Laure dont les cheveux s’envolent et lui reviennent sans cesse dans les yeux à cause du toit ouvrant, mais il fait si doux. Elle a levé le bras pour sentir l’air lui passer entre les doigts, Andreas roule vite, comme toujours. Elle en a les larmes aux yeux. Une poussière sans doute, elle rit toute seule. Resserre le col de sa chemise – elle est si fragile. Tu as froid, dit Andreas. – Non, je fais attention, c’est tout. Tu me connais. – On s’arrête prendre un café ? – Bientôt.
À l’arrière, Octave se redresse, se penche entre eux deux.
– Un café, je suis pour. On n’a pas assez dormi.
Andreas le repousse en souriant.
– Bientôt, on a dit.