On procrastine beaucoup les projets de meurtre. Une majorité d’êtres humains en ont un jour éprouvé l’envie furieuse ; très peu sont passés à l’acte. Cela finit presque toujours par passer. À cause des contraintes – le huis clos d’un avion, l’absence d’une ronce ou d’une vipère – et parfois d’une vraie difficulté à trouver un mode d’exécution à son goût : assassiner sans défigurer l’être aimé, se soustraire à la vue du sang… À chaque meurtrier sa lubie secrète. D’aucuns se laissent aussi envahir par le doute, pas totalement convaincus de haïr suffisamment l’autre pour le supprimer.
Un orgue un peu kitsch souffla les premières notes de la Marche nuptiale de Mendelssohn – un triolet sentencieux, une blanche suspendue – que Christian confondit un instant avec le générique de La Guerre des étoiles. C’est précisément au moment où il reconnut la mélodie matrimoniale qu’Amélie pénétra dans l’église : telle une princesse de l’espace dans sa robe blanche années quatre-vingt, ses cheveux sombres tressés en deux énormes macarons de chaque côté du crâne, elle traversa la nef au bras d’un homme d’âge mûr et néanmoins fiérot.