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Citation de berni_29


Le club de lecture, c'est très important. Il en pousse partout, comme des champignons, et c'est une forme culturelle presque entièrement dominée par des femmes. En réalité, la lecture de fiction est souvent considérée comme une activité féminine, de nos jours. Beaucoup de femmes lisent de la fiction. La plupart des hommes, non. Les femmes lisent des fictions écrites par des femmes et par des hommes. La plupart des hommes, non. Si un homme ouvre un roman, il aime avoir sous la couverture un nom masculin ; cela a quelque chose de rassurant. On ne sait jamais ce qui pourrait arriver à cet appareil génital externe si l'on s'immergeait dans des faits et gestes imaginaires concoctés par quelqu'un qui a le sien à l'intérieur. En outre, les hommes se vantent volontiers de négliger la fiction : "Je ne lis pas de roman, mais ma femme en lit." De l'imagination littéraire contemporaine émane, semble-t-il, un parfum nettement féminin. Rappelez-vous Sabbatini : nous autres femmes, nous sommes douées pour le verbe. Mais à dire vrai, nous avons été consommatrices enthousiastes du roman dès sa naissance, vers la fin du XVIIIe siècle, et, à cette époque, lire des romans vous avait un arôme de clandestinité. La délicate intelligence féminine, vous vous en souviendrez à la suite de fulminations antérieures dans ce même ouvrage que voici, pourrait aisément souffrir d'avoir été exposée à la littérature, tout spécialement au roman, avec ces histoires de passion et de trahison, ces moines fous et ces libertins, ses seins palpitants et ses Valmont, ses ravageurs et ses ravagés. En tant que passe-temps pour les demoiselles, la lecture de romans faisait monter les roses aux joues par son caractère risqué. La logique : lire est une activité privée, souvent exercée derrière des portes fermées. Une jeune dame pourrait se retirer avec un livre, pourrait même l'emporter dans son boudoir et là, étendue sur ses draps de soie, tandis qu'elle s'imbibe des passions et frissons manufacturés par la plume d'un écrivain polisson, l'une de ses mains, pas absolument indispensable pour tenir le petit volume, pourrait s'égarer. Ce que l'on craignait, en bref, c'était la lecture à une main.
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