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Citation de MegGomar


Dans la rue, elle reconnaissait les femmes dont elle flairait qu’il leur était
arrivé le même genre de choses. À chaque main tremblante, elle devinait :
celle-là aussi. À chaque sursaut que provoquait le cri d’un soldat russe, ou à
chaque tressaillement causé par le bruit des bottes. Celle-là aussi ? Toutes
celles qui ne pouvaient pas s’empêcher de changer de trottoir dès qu’elles
croisaient des miliciens ou des soldats. Toutes celles dont on apercevait, à la
taille de leur blouse, qu’elles portaient plusieurs paires de culottes. Toutes
celles qui n’étaient pas capables de regarder droit dans les yeux. Avaient-ils
dit la même chose à celle-là, lui avaient-ils dit : « Chaque fois que tu iras au
lit avec ton mari, tu te souviendras de moi » ?
Si elle se retrouvait en présence d’une de ces femmes, elle essayait de
s’en tenir le plus loin possible. Afin que la similarité de leurs conduites ne
se remarque pas. Afin que leurs gestes et leur nervosité ne s’amplifient pas
mutuellement. Aux soirées communes du village, Aliide les évitait, parce
que à tout moment pourrait passer l’un de ces hommes, qui se souviendrait
d’elle éternellement. Et peut-être que l’un de ces hommes serait le même
que pour cette autre femme semblable. Elles ne pourraient pas s’empêcher
de jeter un coup d’œil dans la même direction, celle d’où viendrait
l’homme. Elles ne pourraient pas s’empêcher non plus de sursauter en
même temps, si elles entendaient une voix connue. Elles ne pourraient pas
s’empêcher, en levant leur verre, de le renverser en même temps. Elles se
trahiraient. Quelqu’un se rendrait compte. L’un de ces hommes se
rappellerait qu’Aliide était l’une de ces femmes qui avaient été dans la cave
de la mairie.
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