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En cette saison de l’orbite aux lois elliptiques desquelles nous obéissons, si étrangères à toute industrie comme à tout commerce, l’épaisseur de la nuit est telle que nous pouvons prétendre y voir tout ce que nous rêvons encore avoir jamais vécu. Aussi des vies tout entières se reflètent-elles, si nous le voulons, sur la vitre derrière laquelle nous avons désormais à nous tenir ensemble et où j’appuie mon front.

C’est alors un afflux continu de naissances et de morts, d’amours et de chagrins, de trafics et de larcins, de gloire dont resplendir, d’oubli où tomber, de départs, de retours, de meurtres, d’amitiés honorées ou trahies, de familles honnies, de guerres, et de hasards, et d’avenirs, et de débuts et de fins : toutes humeurs et liqueurs venant grossir de leur flot bileux la rumeur qui roule entre nos tempes et déverse dans nos crânes la cascade de ses aveux et de ses pièges.

Reverrons-nous le jour ? Le vrai jour. Celui du soleil et sa suite d’ombres. Larges, courtes, oblongues. De murs, de signes, de silhouettes. À franchir, à reconnaître, à étreindre. Ombres toujours nues de ce qui fuit ou demeure, de ce qui s’effondre ou se dresse. Car l’ombre sans face cachée qui la projette sur sa face opposée, quelle est-elle ? Les soleils d’ici, aussi blancs qu’oignons qu’on pèlerait sur le monde, ne rencontrent d’autre obstacle que la transparence des larmes, sans détresse ni joie, à travers lesquelles nous les regardons se répéter et s’éloigner comme ricochent les galets sur l’onde de nos pleurs ; puis fondre, et sombrer.

En attendant Nadeau, No 178 - août 2023 - De fil en aiguille.
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Plus tard entre onze et quatorze ans j'ai fait quatre séjours linguistiques, à Londres, au twenty-two Chaple Street chez Mrs Furse, une émigrée russe à la voie rauque à faire peur comme au cinéma, qui pour flatter sa vanité me parlait seulement français plutôt que de m'entraîner à l'idiome des autochtones et prétextant que je m'exprimais moi-même déjà assez couramment comme ça dans la langue de Shakespeare sans avoir encore besoin de m'y perfectionner quelle idée ! Or c'était une idée de Maman. Pour moi ça consistait à rester chaque été trois semaines entre Tower Bridge et Carnaby Street, livré à moi-même jusqu'au soir dès après le petit déjeuner. Je traîne alors tout le jour comme un pauvre hère dans Soho puis Piccadilly jusqu'à Hyde Park et retour, poussant parfois l'aventure jusqu'à la National Gallery où j'essaye de me consoler devant les autoportraits de Rembrandt qui a l'air encore plus triste que moi, j'avoue, après avoir pleuré toutes les larmes de mon corps en voyant comme les aéroplanes traversent si facilement le ciel vers mon pays d'où Maman m'a une fois encore exilé, ou bien pire m'escrimant à échapper, l'haleine vite perdue, à la convoitise lubrique de quelques vieux pédophile qui m'a cette fois repéré entre les machines à sous où, désœuvré, j'ai gaspillé mes pennies. Je crois que c'est de cette époque que date l'affermissement de mes idées noires : de ce que Maman m'assurera ensuite être le poids du monde jeté sur mes épaules.
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Je suis au premier étage de l'hôtel particulier du 7, rue Berlioz, près du radiateur froid comme la mort et facilement plus grand que moi, devant une porte entrouverte sur un palier qui donne sûrement sur le vide, quand Grand-Maman et Maman à qui je n'ai rien demandé me répondent que Grand-Papa est parti à cause de son travail pour un très long voyage très très loin - si ça se trouve encore bien plus loin que Tahiti Figure-toi - et que c'est pour ça que je ne l'ai pas vu depuis longtemps et que Tu ferais mieux de penser à autre chose en attendant qu'il revienne Va savoir. Au lieu de quoi j'avoue j'ai compris ce jour-là que Grand-Papa était vraiment mort pour de bon avant d'avoir pu m'offrir LE PONEY qu'il m'avait pourtant promis juré. J'avais six ans et dès lors plus rien qu'un vieux cheval à bascule tout mité pour sentir entre mes cuises frissonner les grands espaces.
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Pour ma conception j'ai attendu la mort de Staline et la chose s'est passée grosso modo peu avant l'intervention soviétique qui a mis fin au soulèvement ouvrier de Berlin-Est. Né en plein Diên Biên Phu, Maman ne s'intéresse à moi j'avoue qu'au tout début de l'insurrection algérienne : époque à laquelle je suis enfin capable de me tenir assis et de commencer à faire bonne figure, rue Berlioz sur la plus haute marche de l'escalier, c'est-à-dire, je suppose, " figure humaine ". Une autre allure en tout cas que dans le ventre. Né en plein Diên Biên Phu et plus exactement un 7 AVRIL : JOUR DE LA CRUCIFIXION DE JESUS DE NAZARETH, GALILEE, quand il s'écrire Père ! Père ! Pourquoi m'as-tu abandonné ?
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